Overblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
SERPENT -  LIBERTAIRE

anarchiste individualiste

EN LUTTE CONTRE LES CRA ! Voix et combats de l’intérieur, solidarités à l’extérieur pour entraver la machine à expulser (décembre 2018 - février 2019) En lutte contre les CRA ! anticra (première parution : mars 2019) Mis en ligne le 14 mai 2019 Thèmes : Immigrations, luttes contre les frontières (30 brochures) Formats : (HTML)   (PDF,2.4 Mo)   (PDF,2.3 Mo)   Version papier disponible chez : I

En lutte contre les CRA !

LES CENTRES DE RÉTENTION ADMINISTRATIVE SONT DES PRISONS

Lorsqu’on parle des CRA [1], il est important de commencer par cela : même si les textes juridiques ne les désignent pas comme tels, ce sont des lieux d’enfermement et de privation de liberté, où les violences policières, les menaces et les humiliations sont à l’ordre du jour. Les prisonniers et les prisonnières reclu.e.s derrière les murs des CRA ont été jugé.e.s coupables d’un crime particulier : celui de ne pas avoir les “bons papiers”. Pour l’Etat, seul le bout de papier compte, et son absence suffit pour enfermer et expulser.

C’est la raison d’être des CRA. Enfermer et expulser, toujours loin des regards.C’est pour cela que les CRA sont situés dans des coins paumés, éloignés de tout sauf des casernes ou des écoles de police, pour que les flics puissent intervenir rapidement en cas de révoltes. Il suffit de faire une visite à un.e copain.e détenu.e pour se rendre compte que l’isolement de ces lieux ne sert qu’à rendre davantage invisibles celleux qui y sont et dissuader la solidarité depuis l’extérieur. La solitude et l’absence des liens avec leurs proches sont calculées pour briser le moral des retenu.e.s afin de mieux les maîtriser. Dans cette brochure, nous montrerons que ce projet ne fonctionne pas toujours : les rébellions et les luttes à l’intérieur n’ont jamais cessé. A l’extérieur, des groupes s’organisent pour les soutenir, mais il reste beaucoup à faire pour que ces prisons disparaissent.

Les CRA sont des lieux d’isolement et d’abus. Mais il ne faut pas se tromper : ils ne sont pas quelque chose de complètement indépendant, d’exceptionnel par rapport au reste. Ils sont un maillon d’une chaîne bien plus large. Cette chaîne va des relations néo-coloniales qui règlent les visas et les accords bilatéraux, jusqu’aux frontières militarisées, des centres d’hébergement et d’accueil aux prisons, des préfectures à la commission d’asile, des tribunaux aux rafles et aux contrôles au faciès dans les rues et dans les gares.Une pluralité d’acteurs font partie de ce système. Certains se disent humanitaires, d’autres sont explicitement répressifs, mais que ce soit pour trier, expulser, ou “éduquer et intégrer”, ils participent tous au grand jeu de fichage et de contrôle des migrant.e.s, de leurs mouvements, de leur comportements, de leurs vies.

Les CRA sont le visage le plus explicite et brutal de la mise à l’écart des migrant.e.s “sans les bons papiers”. Mais ils ne produisent pas que de l’exclusion. Ils ont pour objectif de fabriquer des travailleurs et des travailleuses toujours plus exploité.e.s, soumis au chantage continu de la réclusion et de l’expulsion. Ils sont l’outil de l’État et des patrons pour discipliner et faire baisser la tête aux prisonniers-ères, certes, mais aussi à tou. te.s celleux qui, un jour ou l’autre, pourraient se faire contrôler par des flics dans une station de métro et être renfermé.e.s. Les CRA, comme toutes les prisons, sont une menace toujours présente.

Les CRA sont aussi une source de profit pour les grosses entreprises.L’enfermement paie, comme le savent bien les différentes boîtes qui collaborent avec les forces de répression dans les centres de rétention tout comme lors des expulsions. Les entreprises qui assurent la bouffe, la surveillance, le transport, mais aussi les guichets qui balancent les sans-papiers sont toutes des rouages de la machine à expulser. En permettant concrètement l’existence et le fonctionnement de ces lieux, elles en sont coresponsables. Pour lutter contre les CRA, on peut donc aussi s’attaquer à ces collabos.

Si on replace les centres de rétention au sein d’un système plus vaste, basé sur le profit, l’exploitation et le contrôle des migrant.e.s, les actions concrètes en soutien aux luttes en cours dans les CRA doivent être pensées en continuité avec d’autres solidarités dans les combats des migrant.e.s : pour le logement, contre les frontières, contre les violences policières. Soutenir les résistances qui existent dans les CRA n’est que l’un des points d’entrée dans le combat contre les mécanismes du racisme d’État et de la guerre contre les pauvres.

Ces mécanismes ne sont pas figés : l’ennemi est capable de les affiner et de les adapter aux formes de rébellion qu’ils produisent, pour qu’il puisse y répondre de manière toujours plus efficace. Un exemple en est la nouvelle loi “pour une immigration maîtrisée, un droit d’asile effectif et une intégration réussie” (le titre en dit long). Parmi les mesures de confinement, tri et illégalisation des migrant.e.s : les demandes d’asile ne sont plus suspensives des procédures d’expulsion (ce qui arrivait déjà dans les faits), l’enfermement “hors les murs” - c’est à dire l’assignation à résidence - se durcit, les interdictions de territoire français sont facilitées pour toutes les personnes qui ont eu un refus de titre de séjour, la double peine est applicable à encore plus de situations...Par rapport aux CRA, la rétention administrative est allongée jusqu’à 90 jours. Trois mois derrière les barreaux, voire plus si le prisonnier ou la prisonnière passent directement du CRA à la prison, et de la prison au CRA, comme c’est de plus en plus souvent le cas, sous différents prétextes. Dans la logique de ces mesures, Macron annonce que plus de 400 nouvelles places seront créées pour enfermer les étranger.e.s - et donc pour engraisser aussi les entreprises qui en profitent.

En fait si la loi se transforme, les pratiques policières et celles des tribunaux évoluent aussi. Les actes de résistance des prisonnier.e.s sont réprimés avec une violence toujours grandissante, et la créativité de l’administration n’a pas de limites quand il s’agit de classifier toute tentative de se défendre en chef d’accusation. Ainsi, la décision de ne pas collaborer activement à sa propre expulsion, que ça soit par le refus de la prise d’empreintes, le refus de signer des déclarations qu’on ne comprend pas ou qui déforment la vérité, le refus de voir son consul, ou même le simple fait de dire “non” quand on se voit proposer un vol de retour vers son pays, sont des raisons suffisantes pour que l’État colle une garde à vue à la fin de rétention, et qu’elle s’ensuive d’un nouvel enfermement, en CRA ou en prison. Parler aux passager.e.s sur un vol où l’on est expulsé.e de force devient une “entrave à une mesure d’éloignement”, dénoncer les violences policières est de la “rébellion”, et juste rester ensemble et s’organiser un peu trop avec d’autres retenu.e.s suffit parfois pour être transféré.e ou déporté.e d’urgence sans être prévenu.e.

Malgré tout ça, malgré les humiliations et les violences quotidiennes des matons, malgré le risque constant d’être déporté.e, la bouffe pourrie et l’isolement, malgré tous les efforts déployés pour “pacifier” les CRA, les personnes enfermées se révoltent. A partir de décembre 2018 les résistances individuelles, qui n’ont jamais cessé, deviennent de plus en plus collectives, les grèves de la faim se multiplient, se développent la solidarité entre prisonniers-ères, l’organisation entre différents CRA et les liens avec l’extérieur.

Cette brochure raconte, de manière très partielle et non-exhaustive, des moments conflictuels des deux derniers mois. Non pas pour faire le récit d’une histoire qui n’est pas encore terminée, mais pour faire circuler la parole de celleux qui luttent à l’intérieur et relayer leurs revendications, pour renforcer la solidarité à l’extérieur, pour inventer d’autres moyens qui puissent entraver la machine à expulser.

POUR EN FINIR AVEC CES PRISONS 
ET TOUTES LES AUTRES.


TÉMOIGNAGES

Nous avons décidé d’introduire les luttes en cours par quelques témoignages récents des personnes enfermées, afin de donner un aperçu des expériences qu’elles ont vécu et qui leur exigent, et nous exigent, de se révolter. Le choix de ces récits n’est pas basé sur un quelconque caractère exceptionnel de leur contenu, mais simplement sur les liens qui ont permis que ces histoires sortent de l’isolement carcéral et circulent aussi à l’extérieur.

« D’abord je voudrais parler d’un gars qui est devant moi.

Mon pote il est malade, il est cardiaque. Toute sa famille est en France, son seul problème c’est celui des papiers. Et ça c’est la préfecture qui lui refuse année après année.Aujourd’hui il a demandé à aller à l’hôpital, ils l’ont emmené, escorté et menotté. Ils se sont mis devant la porte de l’hôpital George Pompidou (Meaux). Comme un vrai terroriste. Même le médecin de l’hôpital, D., s’est plaint du traitement des policiers.

Ici, l’infirmerie elle donne juste des dolipranes, ou des trucs psy. Si il rate le rdv de 14h avec son fils, le gars en face de moi il a pas son traitement.En plus le gars vient de me dire qu’on lui donne pas ses médocs, on lui donne pas les médocs prescrits par le docteur. [...] A cause des médicaments qu’ils lui ont donnés il a eu des problèmes. Mais du coup tous les jours son fils lui fait la visite et lui ramène des médocs mais l’infirmière lui donne pas...

Puis pour parler de l’intérieur : ça fait deux jours que les toilettes sont bouchées. Quand je me suis plaint à la Police, on m’a dit ‘demande à tes amis d’arrêter de boucher les toilettes’. Les cellules sont crades, le ménage est pas fait tous les jours. [...] La douche c’est dégueulasse.

Même la bouffe pour chien est meilleure que nous ce qu’on bouffe. Au centre de rétention, même on a pas le droit de ramener de la bouffe dans les visites, on peut pas cantiner a l’offi, on peut pas acheter du shampoing. Si tu t’es pas fait arrêter avec du shampoing bah t’es dans la merde. Ici le shampoing du CRA il sert à rien. Même mon chien je le lave pas avec.

Nos vêtements ils les lavent avec de l’eau. On les met à la laverie tous ensemble. Donc si un de nous a la gale... on l’aura tous. Parce que quand nos vêtements ils nous les rendent ils sentent toujours mauvais.

L’offi ils sont toujours en retard et ça finit toujours plus tôt que c’est annoncé - 16h au lieu de 18h30. Pour la cantine : normalement c’est à 7h, mais ça à jamais commencé a 7h pile y a toujours 10 ou 20m de retard. Mais 7h30 ensuite si t’as 5m de retard, on te dit ‘là c’est chaud ça va fermer, aller presse-toi et la prochaine fois tu viens à l’heure !’

Une fois le gars en face de moi il a demandé un verre d’eau pour prendre ses médocs, on lui a refusé. Une fois, mon co il a commencé a pleurer tellement il a mal (crise de foie). Ils voulaient pas l’emmener à l’hôpital. Après le départ des infirmiers, on a dû appeler les pompiers. Les pompiers au début voulaient pas trop venir ils ont proposé aux keufs de l’amener à l’hôpital. Avant de pouvoir partir il a dû gueuler, taper au mur etc.... faire tout un film pour qu’il parte. Et en plus, si on avait pas appelé les pompiers il serait jamais parti. Après, ils ont cherché à savoir qui avait appelé les pompiers. ‘Qui a appelé ? Qui a appelé ?’ On leur a dit personne, juste y a un malade, faut l’amener.

Moi j’avais une tubeuse, je l’ai ramenée avec moi dès mon arrestation. Après la fouille, on m’a autorisé à la prendre avec moi. Après y a eu une fouille y a une semaine où ils ont tout retourné, tout démonté. Et là on me dit c’est interdit la tubeuse. D’où tu changes la loi en 3 semaines ?

Les policiers ils disent ‘ouai ça pue ça pue’. Ils lavent pas nos vêtements, leur savon sert à rien et après ils disent on pue ?

Avant la grève de la faim ils fermaient la porte à 20h. Maintenant ils re-respectent la règle. Mardi soir on a manifesté et depuis c’est à nouveau 22h comme quand je suis arrivé.

Aujourd’hui ils ont ramené une meuf avec son fils de 3 mois... et son fils est malade.. ils l’ont mis en centre de rétention. Aujourd’hui je l’ai vu dans le couloir j’ai eu le cœur brisé. Je l’ai vu dans le couloir j’ai joué avec le petit... Qu’est ce qu’elle a fait ? Elle est pas humaine ? Elle est pas née en France c’est tout. Ils mettent un petit de trois mois en prison. Il va devenir quoi ? C’est sûr pas président...

Y a des choses qui font mal...

Ici, ils font des vols cachés... ils attachent comme des chiens... ils scotchent... j’ai vu des trucs ça choque. Je connais un gars, le 45e jour ils l’ont amené de force... cagoulé, casqué, scotché de la tête aux pieds...

Le copain il est grave malade... il peut pas prendre ses médocs au bled. En plus ils l’ont amené de manière illégale. Normalement il a fait sa demande d’asile pour annuler le dernier vol, normalement ils doivent attendre... là ils ont pas attendu la réponse ils l’ont emmené quand même.

Sans parler bien sûr des flics, c’est pas tous, qui essayent de nous provoquer. Toujours. Tous les jours. Y en a des sympa mais y a des groupes. Ils te mettent une étoile sur ton nom. Genre dangereux à surveiller, genre comme si t’as une fiche S. Et ça ils les emmènent de force.

Le gars en face de moi, ils l’ont amené au juge menotté... il a parlé au juge menotté. C’est un père de famille... sa fille est comptable mais ici ils s’en foutent, genre il est extrêmement dangereux.

Y a aucune activité, t’as le droit à rien. Il te donnent une nourriture, elle est pourrie. Et t’as pas le droit de faire sortir la nourriture. Tout reste à la cantine. Si t’as besoin de quelques chose va l’acheter mais ici tu peux rien faire rentrer.

Les infirmières là je leur ai dit j’ai plus de lunettes, elle me dit ‘tu peux prendre un RDV d’ici un mois, un mois et demi’. Je portais mes lentilles quand je me suis fait arrêter... forcément je les ai pas récupérées elles sont à l’hôtel...

Aujourd’hui ils nous ont ramené de la purée sèche... on l’a jetée. Tu sais qu’y a plein de religions... Nous on jette on mange rien on mange que des salades. Un plateau par personne, t’as pas le droit d’ajouter quoi que ce soit. 2 petits pains... Juste on te garde vivant...

Normalement ça continue... »

Mesnil-Amelot, 11 janvier 2019.

« Hier soir, j’ai eu un caillou au rein et je suis allé à l’hôpital. Direct après au retour c’est au mitard en bas. Direct alors que j’ai rien fait. De 2h du matin à 14h aujourd’hui ils m’ont mis au mitard. Ici c’est de l’esclavage... c’est même pire. Depuis la prison on m’a amené ici... On est 20 au plus, c’est un p’tit centre. J’ai fait 2 ans de prison... Ils auraient du m’expulser direct mais ils ont rien sur moi. Ni passeport et tout. J’ai dit au juge que même le consulat avait rien dit. Du coup si je suis pas reconnu il s’passe quoi ? »

Plaisir, 25 janvier 2019.

« J’espère que vous avez remarqué que même pendant qu’on était là en train de vous parler [au téléphone] la police est rentrée juste pour voir ‘si on est là’. Est-ce que dans un milieu comme ça quelqu’un peut venir tomber ici par sa propre volonté si on l’avait pas attrapé emmené ?

Donc on n’a même pas une liberté de parler, on a peur, même là les numéros sont enregistrés, on risque, on ne sait pas si nous sommes écoutées ou pas.

Et puis ce sont des chambres de filles, on peut pas d’abord frapper avant, pour savoir, si on était en train de se changer ? Donc ils peuvent nous voir même dans des conditions où l’homme ne peut pas regarder la femme si c’est pas sa femme, donc il y a pas d’intimité, il y a pas le respect [...] C’est traumatisant en fait. Tu viens de quelque part, on te dit que ‘centre de rétention’, on a pas dit ‘la prison’. Mais tu est traumatisée, au milieu de la nuit on rentre dans la chambre ! Et puis on voit les gens qu’on escorte ici, pendant que tu vois le cas de l’autre tu te dis que peut-être moi ça sera pire !

On défend les téléphones avec caméra pour peut-être ne pas filmer ce qui se passe ici. Mais on nous dit qu’ici on ne tape pas, on ne frappe, mais moi depuis que je suis arrivée ici à mon deuxième jour j’ai vu comment on était en train de bastonner quelqu’un ! Pour une femme, on vient appeler une femme, les policiers peuvent venir quatre. Juste pour t’accompagner même devant le juge ou bien... Ça t’effraie. Avant de passer devant le juge on t’enferme dans une prison où parce que tu es là, tu n’aies plus le courage, que tu sois désespérée, peut-être que tu avais des idées pour aller argumenter, du coup avant que tu passes devant le juge si tu es enfermée quelque part et tu sais pas c’est où, dans une maison où il y a pas de lumière, devant la porte c’est clos, mais il y a quatre policiers en attente, pour une seule fille ! [...]

Centre de rétention ça veut dire qu’il y a eu un couac par rapport à nos documents de voyage. Mais pourquoi, pour une personne qui peut se justifier peut-être, vous le traumatisez comme ça ? Et puis, au milieu où nous sommes, il y a pas de téléphone compatible à l’internet pour faire peut-être recours pour le document qui te manque ! Il y a que deux bureaux ici qui s’en occupent, et pour combien de personnes en attente ? Le bureau ouvre à 10 heures et ferme à 12 heures, puis à 14 heures pour fermer à 17 heures. Donc parfois tu es déjà là dans la queue et on te reçoit pas. Tu ne peux pas faire recours, tu es là le téléphone n’est pas compatible, vous savez maintenant les choses se passent à l’internet ! Mais maintenant que tu te retrouves dans un pays lointain, tu as un papier que tu veux demander pour venir compléter, pour justifier, tu ne peux pas, à qui tu vas t’adresser ? Tu ne peux pas ! On a bloqué tous les moyens là, donc on sait pas comment on va évoluer. On fait qu’ajouter les 28 jours, et 28 jours c’est comme si c’était le lendemain, dans les 28 jours on bloque pas le jour où il y aura le vol pour ton pays. Donc en fait t’es en cours de procédure pour chercher ce que tu veux pour que tu t’en sortes, on programme un vol, même si demain tu vas aller rencontrer le juge. Aujourd’hui s’ils sont venus t’appeler ils t’attachent, donc il y a pas de communication... et de toute façon, on doit prévenir d’abord !

S’il y a possibilité de soulèvement ou bien de venir nous écouter un par un sans qu’il y a tout le temps quelqu’un qui va venir nous effrayer pour nous empêcher de dire toute la véritable vérité, nous on est prêtes ! [...] On est traumatisées, vous savez parfois on saigne comme ça, parce que tu vois quelque chose qui te plaît pas, tu coules les règles qui n’étaient pas programmées ! »

Mesnil-Amelot, bloc des femmes, 23 janvier 2019.

« C’était cool que ce soir y ait eu des gens de CRA à la radio. J’ai écouté. Partout c’est la merde. Mais ici aussi il s’est passé des trucs de fou. Faut le dire. C’est important.

Hier les flics ont ramené un gars sur son lit inconscient. On a crié pour qu’il soit amené a l’hôpital. Ils nous ont dit ‘tranquille, il va aller mieux c’est rien’. Le gars il a même pas vu un médecin mais une infirmière ! D’où elle sait ? La police elle m’a dit : ‘T’es médecin ? Non alors pourquoi tu parles ?’.

J’crois y a pas besoin d’être médecin pour voir quand quelqu’un va mal.

Ici c’est ouf ce qu’il se passe.

Y a un gars ils l’ont renvoyé chez lui avec un faux laisser passer ! Comment on fait s’ils font ça ? J’ai eu mon premier vol l’autre jour. J’arrive a l’aéroport et là on me renvoie direct au CRA. Parce qu’y avait pas de laissez-passer... Ça se voyait les keufs de la PAF ils avaient la rage... Ils m’ont ramené au CRA. Mais pourquoi ils font ça ? Ils savent très bien quand ils m’envoient là-bas ce qui se passe. C’est pour te torturer l’esprit. Je leur ai dit que ça devait pas être considéré comme un refus de vol, parce que c’est leur faute. Mais ici c’est un truc de ouf. Tous les jours il se passe des trucs... »

Vincennes, 25 janvier 2019.

« En fait c’est la merde ici là. Y a rien. On peut rentrer rien du tout. Des vêtements. Du manger. Rien du tout. Tu peux faire rien du tout.

Même une promenade. Tu peux pas sortir pour une promenade, t’es enfermé 24 sur 24. On te fait sortir juste pour le ménage. Sitôt après nous faire rentrer. C’est banal ici. Franchement c’est quelque chose pour nous. On est dans la merde. Y a pas de promenade y a rien. Pas dans la chambre. Dans la cour. Y a un couloir t as vu, on reste dans le couloir. Même ma famille veut rentrer des trucs pour manger et elle peut rien rentrer.

Même le réseau y a pas t’as vu. C’est la merde ici. On est 6 dans la chambre ou 7. On est 7 dans la chambre. En plus y a rien à manger. Ils mettent des trucs. Des fois on peut même pas manger. Des fois on meurt de faim. En fait pour acheter à manger, y a que des biscuits, des trucs bidons, pas des trucs bien. Y a rien. Rien. »

Oissel, 18 février 2019.

« Les policiers qui m’ont interpellé m’ont dit qu’y avait eu rébellion. Le flic il était en civil, et au début du contrôle il m’a étranglé. Normal je me défends, non ? En plus on voyait pas son brassard au début.

J’suis mineur et on me considère comme majeur et ça c’est un problème.

Les avocats ils nous parlent 10 minutes avant l’audience et après c’est limite ils parlent pas à l’audience. Genre le mien a dit deux phrases à la barre, et après il a rigolé avec la préfecture et le juge...

Le vrai problème ici c’est les vols cachés. Comment tu peux te préparer sinon ? On fait comment ? On rentre au pays avec des affaires sales. C’est normal ça ? »

Mesnil-Amelot, 20 janvier 2019.

« Je suis mère de deux enfants, j’ai été condamnée à 4 ans de prison depuis 2014. J’ai été condamné à 6 ans de prison, mais j’ai fait 4 ans, avec la réduction de peine moi j’ai fait 4 ans et 2 mois. Et j’ai accouché ma fille en prison. 

Partager cet article
Repost0
Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :
Commenter cet article