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SERPENT -  LIBERTAIRE

anarchiste individualiste

M. BAKOUNINE - CATHECHISME REVOLUTIONNAIRE

M. BAKOUNINE  -  CATHECHISME REVOLUTIONNAIRE

InDaniel Guérin, Ni Dieu, Ni Maître, Anthologie de l'anarchisme,1970


Les sous-titres sont de Daniel Guérin.

D. G.

Négation de l'existence d'un dieu réel, extramondial, personnel, et par conséquent aussi de toute révélation et de toute intervention divine dans les affaires du monde et de l'humanité. Abolition du service et du culte de la divinité.

Remplaçant le culte de Dieu par le respect et l'amour de l'humanité, nous affirmons la raison humaine, comme critérium unique de la vérité ; la conscience humaine, comme base de la justice ; la liberté individuelle et collective, comme unique créateur de l'ordre de l'humanité.

La liberté, c'est le droit absolu de tout homme ou femme majeurs, de ne point chercher d'autre sanction à leurs actes que leur propre conscience et leur propre raison, de ne les déterminer que par leur volonté propre et de n'en être par conséquent responsables que vis-à-vis d'eux-mêmes d'abord, ensuite vis-à-vis de la société dont ils font partie, mais en tant seulement qu'ils consentent librement à en faire partie.

Il n'est point vrai que la liberté d'un homme soit limitée par celle de tous les autres. L'homme n'est réellement libre qu'autant que sa liberté, librement reconnue et représentée comme par un miroir par la conscience libre de tous les autres, trouve la confirmation de son extension à l'infini dans leur liberté. L'homme n'est vraiment libre que parmi les autres hommes également libres ; et comme il n'est libre qu'à titre d'humain, l'esclavage d'un seul homme sur la terre, étant une offense contre le principe même de l'humanité, est la négation de la liberté de tous.

La liberté de chacun n'est donc réalisable que dans l'égalité de tous. La réalisation de la liberté dans l'égalité du droit et du fait est la justice.

Il n'existe qu'un seul dogme, qu'une seule loi, qu'une seule base morale pour les hommes, c'est la liberté. Respecter la liberté de son prochain, c'est le devoir ; l'aimer, l'aider, le servir, c'est la vertu.

Exclusion absolue de tout principe d'autorité et de raison d'État. — La société humaine ayant été primitivement un fait naturel, antérieur à la liberté et au réveil de l'humaine pensée, devenue plus tard un fait religieux, organisé selon le principe de l'autorité divine et humaine, doit se reconstituer aujourd'hui sur la base de la liberté, qui doit devenir désormais le seul principe constitutif de son organisation politique aussi bien qu'économique. L'ordre dans la société doit être la résultante du plus grand développement possible de toutes les libertés locales, collectives et individuelles.

L'organisation politique et économique de la vie sociale doit partir, par conséquent, non plus comme aujourd'hui de haut en bas et du centre à la circonférence par principe d'unité et de centralisation forcées, mais de bas en haut et de la circonférence au centre, par principe d'association et de fédération libres.

Organisation politique

Il est impossible de déterminer une norme concrète, universelle et obligatoire pour le développement ultérieur et pour l'organisation politique des nations ; l'existence de chacune étant subordonnée à une foule de conditions historiques, géographiques, économiques différentes et qui ne permettront jamais d'établir un modèle d'organisation, également bon et acceptable pour toutes. Une telle entreprise, absolument dénuée d'utilité pratique, porterait d'ailleurs atteinte à la richesse et à la spontanéité de la vie qui se plaît dans la diversité infinie et, ce qui plus est, serait contraire au principe même de la liberté. Pourtant il est des conditions essentielles, absolues en dehors desquelles la réalisation pratique et l'organisation de la liberté seront toujours impossibles.

Ces conditions sont :

L'abolition radicale de toute religion officielle et de toute Église privilégiée ou seulement protégée, payée et entretenue par l'État. Liberté absolue de conscience et de propagande pour chacun, avec la faculté illimitée d'élever autant de temples qu'il plaira à chacun, à ses dieux, quels qu'ils fussent, et de payer, d'entretenir les prêtres de sa religion.

Les Églises, considérées comme corporations religieuses, ne jouiront d'aucun des droits politiques qui seront attribués aux associations productives, ne pourront ni hériter, ni posséder des biens en commun excepté leurs maisons ou établissements de prière, et ne pourront jamais s'occuper de l'éducation des enfants, l'unique objet de leur existence étant la négation systématique de la morale, de la liberté et la sorcellerie lucrative.

Abolition de la monarchie, république.

Abolition des classes, des rangs, des privilèges et de toutes sortes de distinctions. Égalité absolue des droits politiques pour tous, hommes et femmes ; suffrage universel.

Abolition, dissolution et banqueroute morale, politique, judiciaire, bureaucratique et financière de l'État tutélaire, transcendant, centraliste, doublure et alter egode l'Église, et comme telle, cause permanente d'appauvrissement, d'abrutissement et d'asservissement pour les peuples. Comme conséquence naturelle : abolition de toutes les universités de l'État, le soin de l'instruction publique devant appartenir exclusivement aux communes et aux associations libres ; abolition de la magistrature de l'État, tous les juges devant être élus par le peuple ; abolition des codes criminels et civils qui sont actuellement en vigueur en Europe, parce que tous, également inspirés par le culte de Dieu, de l'État, de la famille religieusement ou politiquement consacrée, et de la propriété, sont contraires au droit humain, et parce que le code de la liberté ne pourrait être créé que pour la seule liberté. Abolition des banques et de toutes les institutions de crédit de l'État. Abolition de toute administration centrale, de la bureaucratie, des armées permanentes et de la police de l'État.

Élection immédiate et directe de tous les fonctionnaires publics, judiciaires et civils, aussi bien que de tous les représentants ou conseillers nationaux, provinciaux et communaux, par le peuple, c'est-à-dire par le suffrage universel de tous les individus, homme et femmes majeurs.

Réorganisation intérieure de chaque pays en prenant pour point de départ et pour base la liberté absolue des individus, des associations productives et des communes.

Droits individuels

Droit pour chacun, homme ou femme, depuis la première heure de sa naissance jusqu'à l'âge de sa majorité, d'être complètement entretenu, surveillé, protégé, élevé, instruit dans toutes les écoles primaires publiques, secondaires, supérieurs, industrielles, artistiques et scientifiques, aux frais de la société.

Droit égal pour chacun d'être conseillé et soutenu par cette dernière, dans la mesure du possible, au commencement de la carrière que chaque individu, devenu majeur, absolument libre, n'exercera plus sur lui ni surveillance ni autorité aucune et, déclinant vis-à-vis de lui toute responsabilité, ne devra plus que le respect et, au besoin, la protection de sa liberté.

La liberté de chaque individu majeur, homme et femme, doit être absolue et complète, liberté d'aller et de venir, de professer hautement toutes les opinions possibles, d'être fainéant ou actif, immoral ou moral, de disposer en un mot de sa propre personne ; liberté de vivre, soit honnêtement de son propre travail, soit en exploitant honteusement la charité ou la confiances privée, pourvu que cette charité et cette confiance soient volontaires et ne lui soient prodiguées que par des individus majeurs.

Liberté illimitée de toute sorte de propagande par le discours, par la presse, dans les réunions publiques et privées, sans autre frein à cette liberté que la puissance salutaire naturelle de l'opinion publique. Liberté absolue d'associations, sans exempter celles qui par leur objet seront ou paraîtront immorales et même celles qui auront pour objet la corruption et la [destruction](1) de la liberté individuelle et publique.

La liberté ne peut et ne doit se défendre que par la liberté ; et c'est un contresens dangereux que de vouloir y porter atteinte sous le prétexte spécieux de la protéger ; et, comme la morale n'a pas d'autre source, d'autre stimulant, d'autre cause, d'autre objet que la liberté, et comme elle n'est elle-même rien que la liberté, toutes les restrictions qu'on a imposées à cette dernière dans le but de protéger la morale ont toujours tourné au détriment de celle-ci. La psychologie, la statistique et tout l'histoire nous prouvent que l'immoralité individuelle et sociale a toujours été la conséquence nécessaire d'une mauvaise éducation publique et privée, de l'absence et de la dégradation de l'opinion publique qui n'existe et ne se développe et ne se moralise jamais que par la seule liberté ; et la conséquence surtout d'une organisation vicieuse de la société. L'expérience nous apprend, dit l'illustre statisticiens Quételet (2), que c'est la société qui prépare toujours les crimes et que les malfaiteurs ne sont que les instruments fatals qui les accomplissent. Il est donc inutile d'opposer à l'immoralité sociale les rigueurs d'une législation qui empiéterait sur la liberté individuelle.

L'expérience nous apprend, au contraire, que le système répressif et autoritaire, loin d'en avoir arrêté les débordements, l'a toujours plus profondément et plus largement développée dans les pays qui s'en sont trouvés atteints, et que la morale publique et privée a toujours descendu et monté à mesure que la liberté des individus se rétrécissait ou s'élargissait. Et que, par conséquent, pour moraliser la société actuelle, nous devons commencer d'abord par détruire de fond en comble toute cette organisation politique et sociale fondée sur l'inégalité, sur le privilège, sur l'autorité divine et sur la méprise [le mépris ?» de l'humanité ; et après l'avoir reconstruite sur les bases de la plus complète égalité, de la justice, du travail, et d'une éducation rationnelle uniquement inspirée par le respect humain, nous devons lui donner l'opinion publique pour garde et, pour âme, la liberté la plus absolue.

Pourtant la société ne doit point rester complètement désarmée contre les individus parasites, malfaisants et nuisibles. Le travail devant être la base de tous les droits politiques, la société, comme une province, ou nation, chacune dans sa circonscription respective, pourra en priver [de ces droits» tous les individus majeurs qui n'étant ni invalides, ni malades, ni vieillards, vivront aux frais de la charité publique ou privée, avec l'obligation de les leur restituer aussitôt qu'ils recommenceront à vivre de leur propre travail.

La liberté de chaque individu étant inaliénable, la société ne souffrira jamais qu'un individu quelconque aliène juridiquement la liberté, ou qu'il l'engage par contrat vis-à-vis d'un autre individu autrement que sur le pied de la plus entière égalité et réciprocité. Elle ne pourra pourtant pas empêcher qu'un homme ou qu'une femme, dénués de tout sentiment de dignité personnelle, ne se mettent sous contrat vis-à-vis d'un autre individu, dans un rapport de servitude volontaire, mais elle les considérera comme des individus vivant de la charité privée et par conséquent destitués de la jouissance des droits politiques, pendant toute la durée de cette servitude.

Toutes les personnes qui auront perdu leurs droits politiques seront également privées de celui d'élever et de garder leurs enfants. En cas d'infidélité à un engagement librement contracté ou bien en cas d'attaque ouverte ou prouvée contre la propriété, contre la personne et surtout contre la liberté d'un citoyen, soit indigène soit étranger, la société infligera au délinquant indigène ou étranger les peines déterminées par ses lois.

Abolition absolue de toutes les peines dégradantes et cruelles, des punitions corporelles et de la peine de mort, autant que consacrée et exécutée par la loi. Abolition de toutes les peines à terme indéfini ou trop long et qui ne laissent aucun espoir, aucune possibilité réelle de réhabilitation, les crime devant être considéré comme une maladie et la punition plutôt comme une cure que comme une vindicte de la société.

Tout individu condamné par les lois d'une société quelconque, commune, province ou nation, conservera le droit de ne pas se soumettre à la peine qui lui aura été imposée, en déclarant qu'il ne veut plus faire partie de cette société. Mais dans ce cas celle-ci aura à son tour le droit de l'expulser de son sein et de le déclarer en dehors de sa garantie et de sa protection.

Retombé ainsi sous la loi naturelle œil pour œil, dent pour dent, au moins sur le terrain occupé par cette société, le réfractaire pourra être pillé, maltraité, même tué sans que celle-ci s'en inquiète. chacun pourra s'en défaire comme d'une bête malfaisante, jamais pourtant l'asservir ni l'employer comme esclave.

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