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SERPENT -  LIBERTAIRE

anarchiste individualiste

Malaise dans la représentativité syndicale

Malaise dans la représentativité syndicale

       

n « retournement historique ». C’est ainsi qu’ont été présentés les résultats de la deuxième mesure de la représentativité syndicale, le 31 mars 2017 : pour la première fois de son histoire, la Confédération générale du travail (CGT) est détrônée par la Confédération française démocratique du travail (CFDT). Passant de 26,77 % des suffrages exprimés lors du précédent résultat, en 2013, à 24,85 % cette année, la CGT perd 50 000 voix et se trouve reléguée en deuxième position. A contrario, la CFDT progresse en voix (+ 65 000), ce qui lui permet d’arracher un score légèrement supérieur à celui de 2013, avec 26,37 % des suffrages exprimés, contre 26 % la fois précédente. Le journaliste du Monde Michel Noblecourt parle même d’un « séisme » (31 mars 2017).

S’il fallait retenir quelque chose de la tectonique des plaques, c’est pourtant moins l’idée d’un tremblement de terre que celle des mouvements lents et progressifs de la dérive des continents. Loin d’être brutale ou surprenante, la victoire de la CFDT était prévisible et doit être relativisée dans son interprétation. Un élargissement de la focale permet de montrer que les scores des deux centrales ne sont que la partie visible d’évolutions plus profondes qui affectent l’ensemble du paysage syndical.

Du bon usage de la « mesure d’audience »

Les résultats rendus publics par le ministère du travail ne constituent qu’une mesure technique que l’État calcule à des fins pratiques : définir les prérogatives des organisations syndicales dans la négociation collective. Cette mesure détermine qui, dans le secteur marchand et associatif, participe aux négociations, peut signer des accords ou s’y opposer. Il ne s’agit pas pour autant d’une image fidèle de la représentativité sociale des organisations salariales.

Longtemps, ce pouvoir de négociation était le même pour tous les syndicats présumés représentatifs, c’est-à-dire ceux affiliés aux cinq confédérations historiques selon une liste établie en 1966 : la CGT, la CFDT, Force ouvrière (FO), la Confédération française des travailleurs chrétiens (CFTC) et la Confédération française de l’encadrement - Confédération générale de ces cadres (CFE-CGC) (1). Il suffisait qu’un accord soit signé avec l’une d’entre elles sur le lieu de travail, dans la branche ou au plan national interprofessionnel pour être valide. À partir des années 1970, la CGT et la CFDT ont de plus en plus critiqué un système qui permettait au patronat de sélectionner ses interlocuteurs quel que soit leur poids réel. La signature d’accords dérogatoires sur le temps de travail, à partir de 1982, et la place croissante donnée à la négociation d’entreprise depuis ont renforcé cette préoccupation.

Ces organisations ont alors revendiqué le principe de l’« accord majoritaire », dont la validité juridique est subordonné au poids électoral des signataires. Cette règle a été définitivement inscrite dans la loi du 20 août 2008 réformant la représentativité syndicale. Ce que l’on appelle la « présomption irréfragable » de représentativité des cinq confédérations a été abrogée, leur représentativité étant désormais définie à partir d’un certain nombre de critères, le principal étant celui des résultats aux élections professionnelles.

Ainsi, pour participer à la négociation collective, un syndicat doit dépasser un seuil minimal de suffrages exprimés : 10 % dans l’entreprise, 8 % dans les branches et au plan national interprofessionnel. En outre, un accord collectif n’est désormais valide que s’il a été signé par un ou des syndicats représentant au moins 30 % des voix, tandis qu’un ou plusieurs syndicats représentant plus de 50 % des suffrages peuvent le bloquer.

Si le calcul de la représentativité électorale est techniquement assez simple dans les entreprises où s’organisent les élections professionnelles (pour le comité d’entreprise ou les délégués du personnel), cela se complique quand on veut toucher tous les salariés. Lors de discussions, certains avaient proposé de s’appuyer sur le scrutin prud’homal ; d’autres suggéraient de relancer les élections à la Sécurité sociale ou encore d’instituer un scrutin à l’échelle des branches. La solution finalement retenue a consisté à combiner les élections professionnelles existantes avec deux autres élections.

Les scores annoncés le 31 mars 2017 additionnent ainsi les résultats de trois scrutins aux périmètres et aux modes d’organisation très différents. Ce sont d’abord les dizaines de milliers d’élections de représentants du personnel qui se sont tenues dans les entreprises de plus de dix salariés entre le 1er janvier 2013 et le 31 décembre 2016 : 4,8 millions de travailleurs, sur près de 14 millions concernés, ont pu mettre un bulletin dans l’urne au cours de cette période. Vient ensuite le vote de 330 000 salariés des très petites entreprises (TPE), qui s’est déroulé par correspondance et en ligne en janvier 2017 et qui les a amenés à se prononcer en faveur d’un sigle syndical. Les TPE, qui comptent 4,5 millions de salariés, n’étant légalement pas contraintes d’organiser d’élections du personnel, la loi du 15 octobre 2010 a institué ce scrutin ad hoc pour les intégrer à la mesure d’audience. Enfin, la participation des 300 000 salariés du secteur agricole a été prise en compte via le scrutin de janvier 2013 pour les chambres départementales d’agriculture, qui n’a mobilisé que 50 000 votants. C’est dire l’hétérogénéité des scrutins ainsi réunis.

 

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