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SERPENT -  LIBERTAIRE

anarchiste individualiste

Après les attentats du 13 novembre, c’est à l’Otan d'attaquer Daech

Il y a un temps pour la puissance douce et les stratégies à long terme. Mais les attentats de Paris prouvent aussi qu'il est plus que temps d'éradiquer l’État islamique.

Au matin du 14 novembre, après une longue nuit de terreur sur Paris, le champ lexical de la guerre est quasiment impossible à éviter. Le président François Hollande a déclaré qu’il s’agissait d’un «acte de guerre commis par une armée terroriste, Daech, une armée djihadiste contre la France». Du côté de l’État islamique, on s’est félicité d’une «attaque bénie» menée par des «soldats», avant de promettre de nouvelles attaques. Le pape François a décrit l’époque actuelle comme une Troisième Guerre mondiale se faisant par«morceaux».

Au matin du 14 novembre, le ciel de Paris était morne et gris, à l’image de l’humeur planant sur la ville. Mais tandis que le gouvernement français se prépare à une riposte armée [l’armée française a largué vingt bombes dimanche 15 novembre au soir sur Raqqa, capitale officieuse de l’État islamique; NDLR], les alliés militaires de la France –y compris les États-Unis– seraient avisés d’en faire autant. Paris serait en droit d’attendre de l’Otan qu’elle joue un rôle de premier plan dans l’organisation d’une riposte d’envergure à ces attentats.

Résolution à agir

À Bruxelles, QG politique de l’Otan, et à Mons, son«Pentagone» situé à une heure de route au sud, le week-end aura été chargé. Après tout, cette alliance de vingt-huit nations s’organise notamment autour d’un principe fondateur entériné dans l’article 5 de son traité constitutif, le Traité de l’Atlantique nord: «Les parties conviennent qu’une attaque armée contre l’une ou plusieurs d’entre elles survenant en Europe ou en Amérique du Nord sera considérée comme une attaque dirigée contre toutes les parties, et en conséquence elles conviennent que, si une telle attaque se produit, chacune d’elles, dans l’exercice du droit de légitime défense, individuelle ou collective, reconnu par l’article 51 de la Charte des Nations unies, assistera la partie ou les parties ainsi attaquées.» Il convient de noter que le seul pays à avoir un jour invoqué l’article sont les États-Unis, à la suite des attentats du 11 septembre 2001.

Si la France en vient à devenir le deuxième pays de l’histoire à invoquer cet article, la première étape sera une réunion de consultation de l’article 4. Une telle assemblée réunira les ambassadeurs des vingt-huit nations, en session permanente à Bruxelles, qui débattront de la situation pour décider de la suite à donner aux événements. L’occurrence la plus récente date de 2014, quand la Turquie avait demandé une consultation de l’article 4 après des attentats commis par l’État islamique dans ce pays.

L’Otan ne peut plus faire comme si ce conflit n’affectait pas ses intérêts les plus fondamentaux

Il est probable que la tenue d’une consultation au titre de l’article 4 en vienne à conclure que les massacres commis à Paris, compte tenu de leur ampleur et de leur gravité, puissent être considérés comme une attaque telle que le définit l’article 5. Ces attentats terroristes sont le point culminant d’un désastre humanitaire affligeant depuis longtemps la Syrie, déstabilisant le Moyen-Orient et générant un flot de millions de réfugiés cherchant à rejoindre le cœur de l’Europe. L’Otan ne peut plus faire comme si ce conflit n’affectait pas ses intérêts les plus fondamentaux.

L’objectif principal d’une mission de l’Otan devrait être la défaite de l’État islamique en Syrie et la destruction des infrastructures qu’il a pu y implanter. Accessoirement, une telle mission permettrait de démontrer la résolution de l’Otan à agir face à la menace.

Exception faite des désaccords internes parfois susceptibles de la ralentir, l’Otan est une imposante force militaire. Les ressources militaires dont peut se targuer l’Otan sont plus que conséquentes. On parle notamment de 3 millions de soldats enrégimentés –et davantage de réservistes–, plus de 25.000 avions militaires, 800 navires de guerre et 50 AWACS. En outre, les vingt-huit nations que regroupe l’Otan représentent plus de la moitié du PIB mondial.

Opération militaire

D’un point de vue pratique, une mission d’envergure de l’Otan contre l’État islamique devrait en passer par plusieurs petites étapes préliminaires.

Premièrement, conformément au Traité de l’Atlantique nord, il faut que le Conseil de sécurité de l’ONU en soit référé. Sur le plan du droit international, l’idéal serait que le Conseil de sécurité approuve une opération militaire, vu que l’Otan peut se passer de son accord pour intervenir.

Ensuite, l’alliance devrait assigner l’un de ses principaux centres de commandements conjoints à la planification et à la conduite d’une riposte opérationnelle. Vu que le centre de Brunssum, aux Pays-Bas, est actuellement chargé des opérations de l’Otan en Afghanistan, la tâche reviendra probablement à un autre centre: celui de Naples, en Italie. C’est là qu’a été menée l’intervention en Libye et ce commandement jouit d’une expérience opérationnelle et planificatrice significative, ainsi que de solides relations avec les partenaires de la coalition dans la région –les Émirats arabes unis, la Jordanie, le Qatar, et autres. De même, les planificateurs militaires de l’Otan ne devraient pas se contenter des membres officiels de la coalition, mais se tourner aussi vers ses partenaires, comme la Suède et la Finlande, et d’autres acteurs régionaux.

Troisième étape: préparer les forces spéciales de l’Otan à un rôle central dans les opérations militaires. Le QG des opérations spéciales de l’Otan, situé à Casteau, en Belgique, devrait s’occuper du partage de renseignements entre les États membres; il devrait aussi préparer le déploiement sur le sol syrien des forces spéciales conjointes de l’alliance afin de former et de motiver des combattants hostiles à l’État islamique, collecter des informations de première main, mener des raids et effectuer des repérages pour les avions de l’Otan et de la coalition.

Quatrième étape d’importance, notamment pour le long terme: que l’Otan mette en place une mission de formation après à la fois des forces kurdes des Peshmerga et des Yézidis au nord de l’Irak et des forces de sécurité irakiennes basées à Bagdad –dont les compétences au sol sont très élevées. Une telle initiative pourrait prendre modèle sur la NTM-I, la mission de formation de l’Otan en place en Irak entre 2004 et 2011.

Coalition ouverte

Cinquièmement, la campagne aérienne menée actuellement en Syrie et en Irak devrait être placée sous le commandement de l’Otan. L’Otan pourrait ainsi augmenter l’ampleur de cette mission en y ajoutant de nouveaux avions, soldats, équipements et AWACS, dont les puissants radars offrent une couverture à 360 degrés de l’espace aérien. En Afghanistan, le système de commandement et de contrôle de l’espace aérien a été très bien organisé par l’Otan et il devrait en être de même avec le conflit actuel.

L’État islamique est une organisation apocalyptique et l’heure de son éradication a sonné depuis longtemps

Enfin, l’Otan devrait mettre l’accent sur la constitution d’une «coalition ouverte», qui ne devrait pas seulement inclure les forces de ses alliés traditionnels, mais aussi celles de son traditionnel adversaire: la Russie. Le gouvernement russe a récemment affirmé vouloir vaincre l’État islamique et ne devrait pas manquer de motivation pour le faire, compte tenu de ses 200 ressortissants –dont bon nombre de femmes et enfants– qui viennent d’être massacrés, a priori par l’État islamique, dans le crash de leur avion. Il faudrait que la Russie soit invitée à participer à une opération contre l’État islamique aux côtés de l’Otan et d’autres membres d’une telle coalition.

Si les Français en appellent à la participation de l’Otan dans une implacable campagne menée contre l’État islamique, il faut que les États-Unis les soutiennent. Ils suivraient ainsi l’exemple donné par la France après le 11-Septembre et, lors d’un siècle antérieur, durant la guerre d’indépendance américaine.

L’État islamique est une organisation apocalyptique et l’heure de son éradication a sonné depuis longtemps. Elle aura décapité et violé des citoyens du monde entier, tué des civils d’une manière aussi atroce que spectaculaire, réduit en esclavage des femmes et des fillettes, vendues comme des marchandises, et a mêmevisiblement abattu un avion de ligne rempli de touristes. Aujourd’hui, dans une salle de concert, elle vient d’abattre froidement des centaines d’individus. Au Moyen-Orient, il y a un temps pour la puissance douce et les stratégies à long terme. Mais il y a aussi un temps pour la puissance dure. Il en va de la responsabilité de l’Otan de reconnaître combien l’époque actuelle sollicite cette dernière.

James Stavridis

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