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SERPENT -  LIBERTAIRE

anarchiste individualiste

Barzani déclare que les peshmergas pourraient faire partie de la coalition pour libérer Raqqa: Le Drian approuve

Question de François Clemenceau : Certains dirigeants estiment que les forces Kurdes sont les mieux expérimentées pour combattre au sol pour battre Daech en Irak ou en Syrie? D’autres pensent que vous n’irez jamais au-delà de vos propres territoires. Qui a raison? Est-il possible d’envisager que vos troupes se battent pour reprendre Raqqa, en dehors de votre zone, en Syrie?
Réponse de Massoud Barzani : Avec beaucoup de victimes, les peshmergas ont obtenu des victoires considérables et notre priorité actuelle est de combattre Daesh. Jusqu’à ce qu'on élimine cette organisation en Irak et en Syrie, la menace du terrorisme restera présente dans la région et dans le monde. Dans le cadre d’une coalition internationale puissante, il est possible que les peshmergas fassent également partie des forces qui libéreront la ville de Raqqa.

Un message reçu 5 sur 5 par le ministre français de la Défense, Jean-Yves Le Drian, qui était l’invité, dimanche matin, du « Grand Rendez-Vous » Europe1, iTélé, Le Monde. Jean-Yves Le Drian a déclaré qu’une victoire contre Daesh “passe nécessairement par une présence au sol. Cela peut être les Kurdes…”.
Certes, il a ajouté que cela peut aussi être “l'armée syrienne libre". Mais l’un n’exclut pas l’autre. Les Kurdes font bel et bien partie du plan de la France, à défaut d’envoyer ses propres troupes au sol, une hypothèse “pas envisagée pour l’instant”.

Pour convaincre l’opinion du bien fondé de cette stratégie, le ministre de la Défense n’a pas eu à remonter très loin dans le temps. Il a rappelé la dernière grande victoire des peshmergas, le 13 novembre 2015… jour des attentats revendiqués par Daesh en France.

« Rappelez-vous le mont Sinjar (NDLR: Shingal) il y a 18 mois, où il y avait ces populations yézidies qui étaient dans la détresse, qui mourraient de faim et de froid. Et qui ont été, pour une partie, récupérés sur le territoire du Kurdistan. Aujourd’hui, parce qu’il y a eu des frappes de la coalition et une attaque au sol des Kurdes, Sinjar est redevenue libre et les Yézidis peuvent désormais y retourner (1). Ça montre qu’il faut du temps, des frappes, et des forces au sol. »

Poursuivant sur la perche tendue par Massoud Barzani dans le Journal du dimanche, il a enfoncé le clou…

«Eh bien oui, nous devrons nous organiser pour prendre Raqqa. L'objectif de demain est Raqqa. »

Raqqa, mais aussi Mossoul, dont la libération intéresse au premier chef les Kurdes d’Irak. Or, avec Raqqa, cette ville fait partie des cibles considérées comme prioritaires par l’Etat français. Mossoul, parce que c’est là que «se trouvent les lieux de décision politique [de Daesh]». Et Raqqa, car c’est là que «se trouvent les centres de formation des “foreign fighters”, c’est-à-dire les combattants destinés à agir à l’extérieur», a souligné Jean-Yves Le Drian, qui garde toujours à l’esprit la menace de nouveaux attentats terroristes de l’envergure de ceux commis le 13 novembre.

Autant dire que les intérêts stratégiques de la région autonome du Kurdistan et de la France se rejoignent. C’était déjà le cas depuis l’été 2014. Mais la France s’était montrée plutôt discrète dans le conflit avec seulement 12 avions opérationnels dans la région, 6 Rafale stationnés aux Emirats arabes unis et 6 Mirage 2000 basés en Jordanie, ne réalisant ainsi que 5% du total des frappes aériennes de la coalition sur Daesh depuis le mois de septembre 2014. Certes, la précision des frappes françaises, réputées bien meilleure que celle des frappes américaines, avait déjà été saluée par les Kurdes. Mais ces derniers réclamaient depuis longtemps un soutien plus marqué. Massoud Barzani l’a d’ailleurs encore affirmé dans le JDD: «Si l’on veut mettre fin à cette guerre, il me paraît indispensable de mieux armer les peshmergas sur le plan quantitatif et qualitatif».

La nécessité de plus et mieux armer les forces kurdes

Cette possibilité, jusqu’ici dans les cartons, est en train de se préciser. Toutefois, l’hiver, au Kurdistan, n’est pas propice au déploiement de matériel lourd au sol. Et quoi qu’il en soit, la libération d’une ville importante comme Shingal a montré qu’une telle opération pouvait nécessiter plusieurs mois de préparation. A court terme, c’est donc sur les avions de la coalition que les peshmergas devront une nouvelle fois compter pour espérer des lendemains qui chantent. Mais maintenant, les avions français seront beaucoup plus nombreux dans le ciel.

«La France, parce qu'elle a été agressée lâchement, honteusement, sera impitoyable à l'égard des barbares de Daesh, sur tous les terrains, intérieurs et extérieurs», avait promis le président de la République, François Hollande, le 14 novembre 2015.

Avec l’arrivée du porte avions Charles de Gaulle, opérationnel sur zone à compter du lundi 23 novembre, ce sont désormais 38 avions français qui pourront harceler quasi quotidiennement les positions des jihadistes de Daesh. Une force de frappe qui pourrait s’avérer redoutable. En une semaine, suite aux attentats commis à Paris, les avions français ont déjà détruit six centres de commandement ou camps d’entraînement dans le secteur de Raqqa. Et Daesh a avoué sur ses comptes sociaux qu’ils n’avaient fait aucune victime collatérale. De quoi conforter François Hollande dans ses décisions.

Reste au chef de l’Etat français, mais aussi à Obama et consorts à avoir le véritable courage politique, le courage qui consisterait non seulement à doter les peshmergas d’un véritable armement digne de ce nom, mais aussi à sortir la guérilla du PKK de la liste des organisations terroristes.
En effet, si les peshmergas constituent la force kurde dominante en Irak, c’est le PKK - une organisation kurde rivale - qui a remporté les principales victoires contre Daesh, en Syrie, par le biais de ses alliés du YPG. Leur participation à la libération de Raqqa est primordiale… mais fait déjà grincer des dents à Ankara, chez le principal allié des Etats-Unis dans la région, l'Etat turc ayant fait du PKK son ennemi numéro 1, par peur de voir les Kurdes de Turquie tentés par la voie séparatiste, comme en Irak.

Vers un accord entre peshmergas et YPG?

C’est là que la déclaration de Massoud Barzani au JDD prend toute son importance. Car le YPG s’oppose depuis longtemps au retour des peshmergas syriens formés par le KRG (gouvernement de la région autonome du Kurdistan, réputé pro-Barzani) chez, eux, au Kurdistan de Syrie, pour combattre Daesh. La peur de perdre la suprématie politique que leur confère, sur le terrain, la lutte contre les hommes au drapeau noir, sans doute. Or, ces mêmes YPG, assistés d’hommes du PKK, ne se privent pas, eux, de combattre Daesh au Kurdistan d’Irak (du côté de Shingal et Kirkouk notamment)… où ils en profitent pour diffuser l’idéologie du confédéralisme démocratique prônée par leur leader Abdullah Ocalan (emprisonné en Turquie depuis 1999).

On peut imaginer que ces divisions entre Kurdes - qui ont pourtant fait la preuve de leur efficacité en tant que combattants face à Daesh - n’encouragent pas les pays occidentaux à les armer plus que de mesure, par crainte d’une guerre fratricide, ensuite, comme l’histoire kurde en a trop souvent connue. A cet égard, il est bon de rappeler que, si les supporters des deux camps aiment s’invectiver sur les réseaux sociaux, leurs dirigeants, eux, multiplient les rencontres, y compris à plus haut niveau, comme l’ont montré Massoud Barzani, le président du KRG, et le président du PYD (branche politique du YPG) quelques jours avant la bataille pour la libération de Shingal.

Un accord a-t-il été trouvé, alors, pour permettre aux peshmergas syriens de rentrer chez eux pour prendre part à la libération de Raqqa? Possible. Une chose est sûre, Paris, Washington et Londres font pression en ce sens. Redevenus raisonnables, en mettant de côté leurs différences politiques le temps de la lutte commune contre Daesh, les Kurdes pourraient alors bénéficier des livraisons d’armes qu’ils attendent tant, qu’ils soient peshmergas, YPG ou PKK.

_________________

(1) Des peshmergas et des miliciens yézidis sont effectivement de retour à Shingal, mais pour les civils, ce sera beaucoup plus long, car la ville a été en grande partie détruite par les combats. Massoud Barzani a lancé un appel à la communauté internationale pour qu’elle participe à la reconstruction de la ville martyre.

Posted by phenixkurde
novembre 23, 2015
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