Overblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
SERPENT -  LIBERTAIRE

anarchiste individualiste

Soutenons les yézidis d'Irak

Soutenons les yézidis d'Irak

A l'heure où fuient en masse les chrétiens d'Irak, dont certains ont pu gagner les refuges du Kurdistan, un autre carnage se perpétue. Quarante mille personnes, dont des familles entières, des vieillards et des enfants meurent les uns après les autres de soif et d'épuisement, encerclés sur les hauteurs désolées du mont Sinjar, au Kurdistan irakien. Cette petite chaîne de montagne perdue à la frontière irako-syrienne est leur dérisoire refuge face à la furie meurtrière de l'Etat islamique (EI), dont les tueurs enthousiastes font profession de les massacrer.
D'après les témoignages les plus récents, des dizaines d'enfants en bas âge ont déjà été enterrés par leurs parents mourants, dans des tombes de fortune creusées à mains nues dans la rocaille. Ni musulmans, ni chrétiens, ils sont yézidis. Leur foi est unique, issue d'un syncrétisme religieux nourri des multiples voies spirituelles qui ont coexisté à travers l'histoire dans toute la région du Croissant fertile. La région de Sinjar est l'un de leurs foyers de population principaux.


Malgré la résistance des combattants kurdes qui, dépourvus d'armes et lourdes et à court de munitions, le protégeaient depuis l'effondrement de l'armée irakienne, le Sinjar est tombé, lundi 4 août, aux mains des djihadistes. Dès leur entrée dans la région, ces tueurs se sont livrés aux pires atrocités, exécutant cet ordre simple : massacrer les yézidis, car étant considérés comme polythéistes, ils doivent, selon eux, être abattus comme du bétail. Des témoins qui ont fui Sinjar à temps racontent des piles de cadavres dans les rues, des enlèvements de masse, des viols systématiques. D'après l'Unicef, une quarantaine ont été massacrés au cours des deux premiers jours de l'occupation.


NI AIDE HUMANITAIRE NI SOUTIEN


Deux cent mille personnes ont été jetées sur les routes, rejoignant des refuges surpeuplés où tout manque. Pour ceux qui n'ont pas eu la chance de rejoindre à temps les zones kurdes, il ne restait, comme alternative à un massacre annoncé, qu'une ascension désespérée du mont Sinjar.


Ce refuge aride est en passe de devenir leur tombeau. Encerclés par les positions djihadistes, ils ne peuvent recevoir ni aide humanitaire ni soutien d'aucune sorte. Descendre dans la plaine reviendrait à signer leur arrêt de mort. Sans eau ni nourriture depuis trois jours, sans toit et bientôt coupés du reste du monde par l'extinction de leurs batteries de téléphone portables, ils meurent dans l'indifférence. La chaleur y est caniculaire et les plus faibles partent les premiers. C'est aussi le silence qui les tue. Dépourvus de relais organisés à l'étranger, leur voix n'est pas entendue. Leur cri silencieux venu du fond du berceau ravagé de la civilisation se perd. Ils n'auront bientôt plus la force de le pousser.


Seules les forces militaires kurdes appuyées par l'aviation irakienne peuvent briser le siège. Les combats se poursuivent, mais le Kurdistan irakien n'a, pour l'instant, ni les équipements nécessaires ni le soutien international qui pourraient leur permettre d'accomplir cette mission. Ce qui est aujourd'hui une grave crise humanitaire pourrait tourner demain au génocide si rien n'est fait tout de suite !


La communauté internationale, la France, l'Europe, les Etats-Unis, doivent réagir immédiatement, en donnant à tous ceux qui s'opposent à la barbarie de l'EI les moyens de combattre, mais également en coordonnant une aide humanitaire destinée aux centaines de milliers de personnes qui fuient son avancée.


Lire aussi : Barack Obama autorise des frappes en Irak


Alors que le monde s'apprête à commémorer le centenaire du génocide des Arméniens, perpétré sur les terres voisines de l'Anatolie ottomane, alors que les chrétiens d'Orient sont partout menacés, nous ne pouvons laisser advenir une nouvelle fois l'irréparable, nous ne pouvons fermer les yeux sur le massacre des yézidis d'Irak !


Gérard Chaliand (Géopoliticien)
Bernard Kouchner (ancien ministre des affaires étrangères)
Frédéric Tissot (médecin)
Les yézidis
suivent un vieux culte monothéiste et passent pour des adorateurs du diable aux yeux des islamistes radicaux. Cette minorité religieuse plonge ses racines dans l’Iran ancien et compte des communautés en Irak, Russie, Géorgie, Arménie, Allemagne, Canada et Etats-Unis. Leur principal lieu de culte est le temple de Lalesh, dans le Kurdistan irakien

La communauté kurdophone yézidie, cible des djihadistes de l'Etat islamique
LE MONDE | 12.08.2014 à 13h03 |
Par Sophie Gillig
Abonnez-vous
à partir de 1 € Réagir ClasserPartager facebook twitter google + linkedin pinterest


Des Yézidis dans la province de Dohouk en Irak le 7 août 2014.
C''est l'une des cibles des djihadistes de l'Etat islamique (EI) en Irak : la communauté kurdohone des yézidis. Avec la prise de leur bastion, Sinjar, le 3 août, 400 000 yézidis ont dû fuir dans les montagnes, sans eau ni nourriture sous une chaleur pouvant atteindre les 50 °C. Adorateurs du diable pour certains, païens pour d'autres, les membres de cette communauté sont persécutés de longue date.
La synthèse : En Irak, le compte à rebours pour sauver la minorité yézidie est lancé


Qui sont les yézidis ?
Les yézidis sont une communauté kurdophone qui compte entre 100 000 et 600 000 personnes en Irak, selon les estimations. Ils font partie des populations les plus anciennes de la Mésopotamie, où leur croyance est apparue il y a plus de quatre mille ans. Leur principal lieu de culte est Lalech, dans le Kurdistan irakien, mais plusieurs milliers de yézidis habitent en Syrie, en Turquie, en Arménie et en Géorgie.


On compte d'importantes communautés en Europe, particulièrement en Allemagne où vivent 40 000 yézidis.


Quelles sont leurs croyances ?
« Les yézidis ont enrichi leur religion par des apports coraniques et bibliques pour se camoufler des musulmans et des chrétiens afin de ne pas trop se faire remarquer », indique Frédéric Pichon, chercheur et spécialiste du Proche-Orient à l'université François-Rabelais de Tours. Le yézidisme est une religion monothéiste qui puise une partie de ses croyances dans le zoroastrisme, la religion de la Perse antique. Leur culte et leurs rituels se transmettent oralement, c'est pourquoi on ne devient pas yézidi, on naît yézidi.


Les fidèles de cette religion croient en un dieu unique, Xwede, qui fut assisté par sept anges lorsqu'il créa le monde, dont le plus important est Malek Taous, souvent représenté par un paon, symbole de diversité, de beauté et de pouvoir.


Comme pour les musulmans et les chrétiens, le bien et le mal occupent une place importante chez les yézidis. Présents dans le cœur des hommes, il ne tient qu'à eux de faire le bon choix.


Pourquoi sont-ils persécutés ?
Si les yézidis sont persécutés depuis la nuit des temps, c'est parce que les autres religions, que ce soit l'islam ou le christianisme, ont une interprétation erronée de leur culte. « En Irak et en Syrie, on les a pris pour des adorateurs du diable parce qu'ils ont fait une espèce de bricolage entre les deux religions du Livre », précise Frédéric Pichon. L'archange Malek Taous a ainsi faussement été pris pour le diable par les musulmans. Certaines pratiques et restrictions des yézidis peuvent paraître farfelues. Par exemple, les yézidis ne peuvent manger de laitue ou porter des vêtements bleus.


Ces pratiques ont contribué à créer une forme de mépris chez leurs voisins musulmans. « Les yézidis sont des adorateurs du feu, ce qui les fait apparaître comme des païens aux yeux des Syriens, complète Frédéric Pichon. L'islam n'a pas de considération pour cette religion, contrairement au christianisme et au judaïsme, qui sont tolérés. »


La tribune : « Soutenons les yézidis d'Irak, il y a un risque de génocide »


Quelle est la situation actuelle des yézidis ?
« La situation des réfugiés yézidis est particulièrement dramatique. Des populations entières sont dans le plus grand dénuement, ceux du Sinjar risquent de disparaître. Certaines familles rencontrées à Zakho, près de la frontière turque, ont marché pendant trois ou quatre jours », raconte Sébastien de Courtois, journaliste indépendant et producteur à France Culture, qui se trouve actuellement à la frontière turco-syrienne. « La peur panique se lit encore dans leurs regards. Les scènes de carnage qu'ils racontent sont insoutenables. Les forces de l'EI s'acharnent contre eux. Ils veulent tous les assassiner », ajoute Sébastien de Courtois.


D'après Frédéric Pichon, l'Etat islamique applique à la lettre la doctrine de l'islam conquérant. « L'EI est dans une logique de régénération de l'islam, dans une volonté de purification de la religion comme l'étaient les “Born again Christian” , les atrocités en moins », précise-t-il.


« Le problème yézidi n'est pas un problème religieux, c'est une question de domination totalitaire, renchérit Jean-Pierre Filiu, professeur des universités à Sciences Po. Une fois que l'EI en aura fini avec les yézidis, il s'en prendra à une autre minorité. »




Ce n'est pas la première fois que les yézidis sont persécutés. En août 2007, quatre attentats-suicides simultanés coordonnés par Al-Qaida en Mésopotamie avaient causé la mort d'environ 400 personnes, représentant l'attentat le plus meurtrier depuis le 11 septembre 2001.


Le déclencheur d'un tel carnage ? Les terroristes n'avaient pas supporté qu'un jeune garçon yézidi tombe amoureux d'une jeune sunnite, selon M. Pichon.


En 2001, 900 Kurdes d'Irak, originaires des régions pétrolières de Mossoul et Kirkouk, alors sous le contrôle de Saddam Hussein, avaient fait naufrage à bord du navire East-Sea, au large de Fréjus, dans le Var : 70 % des naufragés étaient de confession yézidie et disaient subir des persécutions au quotidien à cause de leur religion.


Sophie Gillig



Partager cet article
Repost0
Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :
Commenter cet article