anarchiste individualiste
12 Novembre 2014
Le vendredi 31 octobre dernier, veille de la journée mondiale «Urgence pour Kobanê», un
meeting était organisé à Paris par le collectif "Anarchistes solidaires du Rojava". Une
petites centaine de personnes y a participé, entre interrogations multiples sur le sens de
ce combat et envie de faire quelque chose. Voici le texte de l'intervention qui a été
prononcée en introduction de cette soirée ---- Cher(e)s ami(e)s, cher(e)s camarades, chers
frères et soeurs kurdes ---- C'est avec beaucoup de fierté, qu'en ce vendredi, veille de
la journée internationale de solidarité avec Kobanê, que je prends la parole dans votre
meeting, au nom de l'initiative anarchiste de solidarité avec le Rojava, un collectif qui
s'est constitué récemment sur Paris à l'initiative d'individus membres d'organisations
libertaires ou non et qui tente par différents moyens d'attirer l'attention et de
développer une solidarité politique et matérielle avec les combattants et les combattantes
de Kobanê et plus largement avec les peuples du Rojava en lutte.
Depuis 6 semaines la ville de Kobanê est le théâtre de combats acharnés de la part des
volontaires de l'YPG et de l'YPJ. Sous les yeux du monde entier, la lutte des Kurdes pour
défendre à la fois l'autonomie territoriale et politique du Rojava et résister jusqu'à la
mort aux vagues d'attaques des mercenaires de l'Etat Islamique, force non seulement le
respect et l'admiration mais est en train d'ouvrir une nouvelle séquence à la fois pour le
Kurdistan lui-même, mais aussi pour toute la région, et enfin pour tous ceux et celles qui
s'intéressent de près ou de loin à toutes les voies que prennent les tentatives
d'émancipation.
La résistance de Kobanê est devenue la résistance de l'ensemble des Kurdes, de toute la
région et de toute la diaspora. Elle est devenue un facteur de premier ordre dans le
sentiment d'appartenance et de puissance dans cette capacité aujourd'hui de prendre son
destin en main, d'écrire un nouveau chapitre de l'histoire de ce peuple certes opprimé
mais qui s'est toujours battu, les armes à la main pour faire respecter sa dignité, son
xistence et ses droits.
Mobilisation dont témoignent les dernières manifestations en Turquie qui ont connu un
niveau de violence rappelant les années 1990: plus de 50 morts en quelques jours,
couvre-feu, déploiement de l'armée dans les villes. Mobilisation de milliers de Kurdes et
aussi de Turcs solidaires à la frontière turco-syrienne pour afficher leur soutien au plus
près des résistants et en défi vis-à-vis de l'armée turque. Mobilisation avec les
centaines, les milliers de jeunes et de moins jeunes qui ont forcé les barrages, découpé
les barbelés et ont rejoint pour un jour, pour une semaine ou plus, les habitants qui
refusaient de quitter leurs foyers et les combattant-e-s de la cité assiégée.
Le caractère exceptionnel de cette bataille est aussi qualitatif: Il n'a échappé à
personne que les combattants et combattantes sont majoritairement issus de la gauche kurde
et qu'ils/elles sont les acteurs d'un projet d'autonomie politique et territoriale dans le
Rojava projet basé sur la critique du concept de l'Etat Nation, sur le pouvoir communal,
l'égalité hommes-femmes, la mixité de genre, la prise en compte inclusive de toutes les
minorités de cette région, sur des formes de justice moins punitive mais basée sur le
consensus et l'idée de réhabilitation, sur des formes de démocratie originales.
La révolution du Rojava et ce que le mouvement kurde appelle le «confédéralisme
démocratique» est une proposition qu'il faut replacer dans le contexte des soulèvements du
«printemps arabes», et qui prend toute son importance compte tenu de leurs bilans, de
leurs échecs et des questions qui avaient été ouvertes alors et qui sont restées sans
réponses. Elle doit être considérée comme une proposition valide et concrète pour
l'ensemble de la région méditerranéenne et moyen-orientale: une alternative cohérente à
tous les régimes d'oppression et de spoliation, sans exception, issus des découpages
territoriaux de l'époque coloniale et des deux guerres mondiales, aussi bien les chimères
u «nationalisme arabe» à parti unique et aux dictatures militaires que les
pétromonarchies, les différentes variantes de l'islamisme politique ou bien encore l'État
colonialiste d'Israël.
Si la bataille de Kobanê est dotée d'une spécificité, c'est le champ des possibles
qu'ouvre la victoire des combattant-e-s kurdes: ce que Kobanê marque particulièrement
comme rupture avec des décennies de domination impériale des puissances capitalistes,
c'est que la lutte particulière d'un peuple particulier pour sa liberté est en train de
devenir le nom universel de la libération de tous.
C'est le sens qu'incarne le slogan: «la lutte de Kobanê est celle de l'humanité toute
entière».
Les Kurdes du Rojava n'ont pas demandé un «droit à la différence». Ils ont mis en avant la
légitimité de leur combat au regard des critères internationalement admis comme le droit à
l'autodétermination. Mais ils ont aussi mis en avant leur projet, leurs réalisations, leur
propositions et ont fait valoir que, ce pourquoi ils et elles se battaient pouvait être
repris partout ailleurs où les questions nationales et les oppressions contre les
identités ont été niées ou instrumentalisées par les États, que leurs propositions
pouvaient contribuer à inverser le cours de l'histoire, le faire dévier de sa trajectoire
et mettre un terme à des siècles de domination coloniale et impériale, qu'il s'agit là
d'une lutte pour l'humanité comme l'avaient aussi affirmé les zapatistes il y a quelques
années dans le fin fond des montagnes du sud-est mexicain («contre le néo-libéralisme et
pour l'humanité»).
Ce qui est nouveau et remarquable c'est que le formidable mouvement de sympathie qui
s'exprime de manière croissante depuis plusieurs semaines envers les résistants et
résistantes de Kobanê, n'est pas orienté vers des figures renouvelées de la «victime»
Le vendredi 31 octobre dernier, veille de la journée mondiale «Urgence pour Kobanê», un
meeting était organisé à Paris par le collectif "Anarchistes solidaires du Rojava". Une
petites centaine de personnes y a participé, entre interrogations multiples sur le sens de
ce combat et envie de faire quelque chose. Voici le texte de l'intervention qui a été
prononcée en introduction de cette soirée ---- Cher(e)s ami(e)s, cher(e)s camarades, chers
frères et soeurs kurdes ---- C'est avec beaucoup de fierté, qu'en ce vendredi, veille de
la journée internationale de solidarité avec Kobanê, que je prends la parole dans votre
meeting, au nom de l'initiative anarchiste de solidarité avec le Rojava, un collectif qui
s'est constitué récemment sur Paris à l'initiative d'individus membres d'organisations
libertaires ou non et qui tente par différents moyens d'attirer l'attention et de
développer une solidarité politique et matérielle avec les combattants et les combattantes
de Kobanê et plus largement avec les peuples du Rojava en lutte.
Depuis 6 semaines la ville de Kobanê est le théâtre de combats acharnés de la part des
volontaires de l'YPG et de l'YPJ. Sous les yeux du monde entier, la lutte des Kurdes pour
défendre à la fois l'autonomie territoriale et politique du Rojava et résister jusqu'à la
mort aux vagues d'attaques des mercenaires de l'Etat Islamique, force non seulement le
respect et l'admiration mais est en train d'ouvrir une nouvelle séquence à la fois pour le
Kurdistan lui-même, mais aussi pour toute la région, et enfin pour tous ceux et celles qui
s'intéressent de près ou de loin à toutes les voies que prennent les tentatives
d'émancipation.
La résistance de Kobanê est devenue la résistance de l'ensemble des Kurdes, de toute la
région et de toute la diaspora. Elle est devenue un facteur de premier ordre dans le
sentiment d'appartenance et de puissance dans cette capacité aujourd'hui de prendre son
destin en main, d'écrire un nouveau chapitre de l'histoire de ce peuple certes opprimé
mais qui s'est toujours battu, les armes à la main pour faire respecter sa dignité, son
existence et ses droits.
Mobilisation dont témoignent les dernières manifestations en Turquie qui ont connu un
niveau de violence rappelant les années 1990: plus de 50 morts en quelques jours,
couvre-feu, déploiement de l'armée dans les villes. Mobilisation de milliers de Kurdes et
aussi de Turcs solidaires à la frontière turco-syrienne pour afficher leur soutien au plus
près des résistants et en défi vis-à-vis de l'armée turque. Mobilisation avec les
centaines, les milliers de jeunes et de moins jeunes qui ont forcé les barrages, découpé
les barbelés et ont rejoint pour un jour, pour une semaine ou plus, les habitants qui
refusaient de quitter leurs foyers et les combattant-e-s de la cité assiégée.
Le caractère exceptionnel de cette bataille est aussi qualitatif: Il n'a échappé à
personne que les combattants et combattantes sont majoritairement issus de la gauche kurde
et qu'ils/elles sont les acteurs d'un projet d'autonomie politique et territoriale dans le
Rojava projet basé sur la critique du concept de l'Etat Nation, sur le pouvoir communal,
l'égalité hommes-femmes, la mixité de genre, la prise en compte inclusive de toutes les
minorités de cette région, sur des formes de justice moins punitive mais basée sur le
consensus et l'idée de réhabilitation, sur des formes de démocratie originales.
La révolution du Rojava et ce que le mouvement kurde appelle le «confédéralisme
démocratique» est une proposition qu'il faut replacer dans le contexte des soulèvements du
«printemps arabes», et qui prend toute son importance compte tenu de leurs bilans, de
leurs échecs et des questions qui avaient été ouvertes alors et qui sont restées sans
réponses. Elle doit être considérée comme une proposition valide et concrète pour
l'ensemble de la région méditerranéenne et moyen-orientale: une alternative cohérente à
tous les régimes d'oppression et de spoliation, sans exception, issus des découpages
territoriaux de l'époque coloniale et des deux guerres mondiales, aussi bien les chimères
du «nationalisme arabe» à parti unique et aux dictatures militaires que les
pétromonarchies, les différentes variantes de l'islamisme politique ou bien encore l'État
colonialiste d'Israël.
Si la bataille de Kobanê est dotée d'une spécificité, c'est le champ des possibles
qu'ouvre la victoire des combattant-e-s kurdes: ce que Kobanê marque particulièrement
comme rupture avec des décennies de domination impériale des puissances capitalistes,
c'est que la lutte particulière d'un peuple particulier pour sa liberté est en train de
devenir le nom universel de la libération de tous.
C'est le sens qu'incarne le slogan: «la lutte de Kobanê est celle de l'humanité toute
entière».
Les Kurdes du Rojava n'ont pas demandé un «droit à la différence». Ils ont mis en avant la
légitimité de leur combat au regard des critères internationalement admis comme le droit à
l'autodétermination. Mais ils ont aussi mis en avant leur projet, leurs réalisations, leur
propositions et ont fait valoir que, ce pourquoi ils et elles se battaient pouvait être
repris partout ailleurs où les questions nationales et les oppressions contre les
identités ont été niées ou instrumentalisées par les États, que leurs propositions
pouvaient contribuer à inverser le cours de l'histoire, le faire dévier de sa trajectoire
et mettre un terme à des siècles de domination coloniale et impériale, qu'il s'agit là
d'une lutte pour l'humanité comme l'avaient aussi affirmé les zapatistes il y a quelques
années dans le fin fond des montagnes du sud-est mexicain («contre le néo-libéralisme et
pour l'humanité»).
Ce qui est nouveau et remarquable c'est que le formidable mouvement de sympathie qui
s'exprime de manière croissante depuis plusieurs semaines envers les résistants et
résistantes de Kobanê, n'est pas orienté vers des figures renouvelées de la «victime»
vulnérable, sans parole et sans défense et en demande d'une «aide humanitaire» auprès de
la «communauté internationale».
Kobanê, n' a pas non plus demandé que des «sauveurs» viennent se battre pour eux (par une
intervention au sol notamment), Kobanê a demandé autre chose de beaucoup plus important
politiquement: ils et elles ont demandé des moyens pour se battre eux-mêmes, et
singulièrement des armes, des munitions, des équipements, pour se défendre comme des
sujets politiques s'affirmant maîtres de leur destin et se battant pour leurs droits, pour
leur émancipation et pour la liberté.
C'est là une rupture fondamentale dans la période qui ouvre aussi pour nous et
potentiellement pour des millions de personnes dans le monde, une nouvelle situation dans
laquelle la résistance aux attaques subies, comme idée et comme pratiques, n'est plus
automatiquement synonyme de défense des acquis ou de retour à un passé glorieux mais
qu'elle peut s'interpréter et se vivre comme l'ouverture sur un nouvel horizon, sur des
conquêtes, des avancées: une voie vers l'avant, un parcours de libération, une lutte
offensive qui remet d'actualité l'idée, l'hypothèse et la possibilité de transformer
l'ordre établi et que cette transformation prenne un cours révolutionnaire.
Il était évident que cette position ne pouvait qu'être combattue et condamnée par les
puissances impérialistes qu'elles soient locales ou occidentales.
La Turquie tout d'abord. Après avoir enfermé les combattants et combattantes kurdes dans
Kobanê en bloquant les issues nord de la ville et empêchant ainsi les renforts et les
approvisionnement en armes et munitions d'arriver, après avoir placé en détention
plusieurs centaines de Kurdes de Syrie ayant trouvé refuge en traversant la frontière,
après avoir réprimé dans le sang les manifestations de soutien à Kobanê, après avoir
réaffirmé vouloir établir une «zone tampon» (proposition soutenu par Hollande) sur le côté
syrien de la frontière, c'est-à-dire là où précisément se trouvent les territoires du
Rojava, la Turquie reste la principale menace pour les Kurdes. L'État turc qui depuis 2011
aide les islamismes de divers courants et mouvements, a clairement fait le choix de l'État
miste contre le mouvement de libération kurde.
Les États-Unis ne sont pas sur la même ligne que la Turquie. Pour eux, Kobanê n'est pas un
objectif stratégique. D'autre part, officiellement, leur mission en Syrie se limite aux
djihadistes. Il faut rappeler qu'officiellement les États-Unis, contrairement à la France,
n'ont jamais cru à un renversement imminent du régime d'Assad. Ils sont donc pour une
transition et donc pour un gouvernement syrien de coalition (c'était le sens des
discussions de Genève en février 2014). Rappelons que l'approche des États-Unis se fait en
prenant en compte les intérêts de la Russie et de l'Iran (d'où l'accord sur la destruction
des armes chimiques) alors que la France (et la Grande Bretagne) veut foncer dans le tas,
renverser Assad, faire battre les Iraniens en retraite et infliger une défaite à Poutine.
Aujourd'hui, les plus «faucons» des occidentaux dans la région sont au quai d'Orsay et à
l'Élysée.
Dans l'histoire, les guerres et les révolutions se sont toujours trouvées intimement
mêlées: refus des guerres inter-impérialistes débouchant sur des soulèvements
révolutionnaires, tentatives révolutionnaires se transformant en guerre ou rattrapés par
des foyers de guerre mal éteints et dévorées par les armées des fossoyeurs de la
révolution... Nous savons d'expérience que toutes les logiques de guerre, même celles
qu'il faut assumer, contiennent les dangers du militarisme, durcissent les rapports,
centralisent les formes de pouvoir et de commandement, referment les espaces et les temps
de réflexion, rejettent les débats et les contradictions qui font la richesse d'un
processus de transformation et vont finalement à l'encontre de la dynamique révolutionnaire.
Comme dans de toutes autres circonstances, les Kurdes se retrouvent aujourd'hui à devoir
mener conjointement une guerre et une révolution. Ils n'auront probablement pas le loisir
de pouvoir choisir entre privilégier l'une au détriment de l'autre, mais une chose est
sûre: le type de solidarité qu'ils recevront pourra contribuer à faire pencher l'équilibre
d'un côté plutôt que de l'autre. Pour notre part, nous entendons, au sein de la société
rde et du mouvement de libération kurde comme à l'intérieur du mouvement de solidarité,
privilégier et appuyer particulièrement les pratiques et les initiatives qui tendent à
l'autonomie et l'auto-organisation des populations et des communautés humaines, soutenir
les tendances qui poussent à l'émancipation politique et à la révolution sociale.
Le projet de l'autonomie kurde n'est pas un projet anarchiste révolutionnaire et
anticapitaliste, il ne vise pas l'établissement du communisme libertaire et l'abolition de
toutes les hiérarchies, du capital et du salariat: mais par contre, de sa victoire ou de
sa défaite dépendra qu'il sera possible, ou pas, de prononcer et de mettre en discussion
certaines idées, certaines exigences, comme l'égalité, le combat contre l'exploitation
capitaliste du travail vivant et l'exploitation domestique des femmes, la prise en charge
collective des décisions sur l'ensemble des questions touchant la vie des gens, en matière
de production, d'habitat, d'éducation, une attention particulière à l'agriculture, une
critique du développement et du productivisme...
On ne demande généralement pas aux protagonistes des luttes que l'on soutient qu'ils
acceptent l'intégralité de nos références et de nos positions en échange de notre
solidarité. Sinon, on reste dans l'entre-soi. La tendance la plus courante consiste plutôt
à affirmer une solidarité avec certaines luttes et pas avec d'autres en fonction de la
présence ou non d'un certain nombre de critères et d'éléments partiels et potentiels de
transformation qu'elles contiennent et font ressortir. Se placer en solidarité avec la
lutte des Kurdes pour leur autonomie, obéit aux mêmes règles: ce n'est pas se bercer
d'illusions et soutenir une «révolution» les yeux fermés ou encore en partager
inconditionnellement les tenants et les aboutissants.
C'est, en fonction de ce qui a été avancé précédemment sur la signification de cette lutte
dans la période et le contexte, plusieurs choses en même temps:
outenir une résistance contre les tentatives d'extermination,
soutenir les significations politiques que ce combat ont déjà produites contre la
victimisation et dans l'irruption d'une troisième ou quatrième voie dans le cadre syrien,
et en même temps, c'est défendre dans le processus même de cette résistance qu'il est
possible de prendre son destin en main, d'affirmer des gestes de l'égalité et de
s'affirmer comme sujet politique et comme sujet de l'histoire, de tracer un chemin
d'émancipation.
En somme, de contribuer à la possibilité qu'une révolution sociale en profondeur soit ne
serait-ce qu'envisageable, faire en sorte que soient réunies quelques conditions
pré-requises pour qu'une transformation de cette nature puisse émerger, puisse s'exprimer
comme une option possible, trouver un écho, des relais, des points d'appui, parvienne à se
traduire dans des conflits, des pratiques, des manières de faire et de vivre, réponde le
cas échéant à une nécessité socialement partagée, se transforme alors en une sorte
d'évidence et devienne réalité.
C'est pourquoi, si les combattants et combattantes kurdes et leurs alliés non kurdes sont
aujourd'hui en première ligne pour affronter, avec leurs corps, avec leur intelligence,
avec leur générosité et les armes à la main, les bandes sanguinaires des cinglés de l'Etat
islamiste, et qu'ils et elles ont donc besoin d'avoir les moyens de se battre, il est très
important qu'ils soient le moins dépendant possible des diverses puissances, et notamment
les États-Unis qui, outre leur position impériale de superpuissance (surtout militaire)
est déjà en soi très problématique pour toute tentative révolutionnaire dans le monde. Il
n'est pas possible de leur faire confiance (rappelons-nous le massacre d'Halabja de mars
1988 consécutif de l'appel des États-Unis au soulèvement des Kurdes), d'autant plus que,
la politique extérieure des Etats-Unis étant connue pour fonctionner par cycles, il est
probable que l'approche étatsunienne plutôt "pragmatique" actuellement se transformera tôt
ou tard dans une nouvelle offensive de «faucons» néo-conservateurs, les mêmes qui ont
engagé jadis massivement les Etats Unis dans la guerre du Vietnam (Nixon) et plus tard,
dans les guerres en Irak (Bush père et fils), aux effets que l'on connait.
En tant qu'anarchistes/communistes libertaires/anticapitalistes antiautoritaires de
France, il faut que l'on accorde une mention très spéciale à Hollande. Le chef de l'État
français s'est en effet très vite aligné sur les positions de la Turquie en exprimant son
soutien à la création d'une «zone tampon» dans le Rojava et le long de toute la frontière
syro-turque. Or, si l'armée turque pénètre sur le sol syrien, c'est à la fois une
déclaration de guerre contre les Kurdes syriens mais aussi contre le régime de Damas.
C'est cela l'autre vrai objectif. Il faut être conscient que c'est cela que veut la
France, gouvernement et opposition confondus: une guerre aérienne et au sol, non pas
principalement contre les djihadistes mais pour entreprendre le chemin de Damas jusqu'au
palais présidentiel.
La France, contrairement aux États-Unis, s'est depuis le début du soulèvement populaire en
Syrie (février-mars 2011) alignée sur l'axe Turquie-Qatar-Arabie saoudite, qui sont les
principaux fournisseurs de l'aide financière et matérielle aux combattants islamistes,
c'est-à-dire dans la position la plus va-t-en-guerre visant à renverser le régime d'Assad
et à le remplacer par quoi, sinon par un régime islamiste sunnite, qui deviendra, en
outre, avec ou sans démembrement du pays, une colonie/protectorat de ces mêmes puissances
régionales (en particulier de la Turquie qui a une longue frontière commune, qui est de
loin la principale puissance militaire et qui verrait bien la région placée une fois de
plus sous la coupe d'un nouvel empire ottoman) et un nouveau marché juteux pour les
multinationales. En s'alignant sur la Turquie, l'État français se fait le complice
objectif du projet d'anéantissement de l'autonomie kurde en Syrie aujourd'hui, et en
Turquie bientôt.
La campagne de solidarité avec la lutte de libération des Kurdes ne peut, en France du
moins, que cibler et dénoncer la dangereuse politique criminelle et cynique du
gouvernement français.
Voir aussi, les dernières nouvelles de Kobanê
http://oclibertaire.free.fr/spip.php?breve575
Kobanê, bientôt deux mois de résistance