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SERPENT -  LIBERTAIRE

anarchiste individualiste

30/09/2017 Publié depuis Overblog

Projet Auteurs Rédaction Proposer Archives CT 1ère série CT 2ème série Critique communiste Carré rouge La Discorde Marx au 21e siècle Rubriques Conjoncture Théorie Stratégie Culture Histoire Récits Enquête CONTRETEMPS REVUE DE CRITIQUE COMMUNISTE Socialisme, démocratie et parti. Réflexions à propos de la Révolution russePatrick Le Moal 10 août 2017 Socialisme, démocratie et parti. Réflexions à propos de la Révolution russe2017-08-21T09:08:13+00:00Histoire, Stratégie Lire hors-ligne : Download PDFDownload ePubDownload mobiPrint 1917 reste un moment de basculement qui n’a guère de précédent dans l’histoire mondiale – sinon sans doute la Révolution française de 1789-1794 – et dont il nous faut tirer les leçons mais, chaque génération faisant face à des problèmes nouveaux, il nous faut refaire sans cesse un travail d’assimilation et d’interprétation des événements passés. C’est à ce prix que la Révolution russe peut encore beaucoup nous apprendre et à nous aider à penser – par ses accomplissements mais aussi par ses échecs – une transformation sociale émancipatrice. Pour alimenter nos réflexions, il importe en premier lieu d’éviter une histoire préécrite et remâchée, qui tourne bien souvent en célébration obsessionnelle de glorieux ancêtres (chaque tradition politique a d’ailleurs les siens). Il nous faut donc revenir au processus révolutionnaire lui-même, au mouvement d’affranchissement, et comme le dit Eric Aunoble « rendre leur statut d’acteurs à ceux qui ont vécu les événements, pour essayer de retrouver leurs raisons d’agir ». Celui-ci ajoute : « Cette orientation de recherche obéirait non seulement à un intérêt pour le passé, mais aussi à la nécessité de penser la transformation sociale à venir. Il y a certes peu de chance que la révolution russe redevienne un enjeu politique central, car le fil de la transmission militante a été rompu depuis longtemps. Inactuelle elle n’est pourtant pas devenue anachronique ». L’ampleur du processus révolutionnaire Les débats sur la Révolution Russe se limitent fréquemment à l’année 1917, quand ce n’est pas Octobre 1917, voire même les « Dix jours qui ébranlèrent le monde »2. Cette période du basculement d’un pouvoir à un autre est décisive, sans aucun doute, comme nous y reviendrons. Mais il est tout aussi essentiel de prendre pleinement en compte l’ampleur du processus révolutionnaire qui a secoué la Russie pendant de longues années. La crise révolutionnaire de 1917 venait de loin, avait une profondeur du même type que celle qui a nourri la révolution chinoise tout au long de la première moitié du 20e siècle, ou encore la Révolution française entre la fin du 18e siècle et la fin du 19e siècle. Un historien russe, le Baron Boris Nodle3, avance l’idée que la révolution de 1917 est l’achèvement de la réforme agraire du 19 février 1861, qui avait émancipé les serfs privés, organisé la remise d’une partie des terres seigneuriales à leur profit, administrées par les mir (collectivités rurales), et qui prévoyait que le partage des terres entre paysans et seigneurs devrait être périodiquement discuté4. C’est à cette période qu’apparaît le mouvement populiste (narodnik), convaincu que la paysannerie serait la base du socialisme au terme d’une révolution violente implacable. Il organise de nombreux actes terroristes contre l’autocratie. Pour Tony Cliff, la tentative d’assassinat du tsar du 4 avril 1866 par l’étudiant Dimitri Karakozov peut avoir été le premier acte de la révolution5. Orlando Figes6 estime quant à lui que c’est à la suite de la grande famine de 1891 que le conflit entre la société qui devenait « plus urbaine, plus éduquée et complexe, et une autocratie fossilisée qui n’accédait pas à ses revendications politiques…devint pour la première fois aigu -révolutionnaire en vérité- ». Léon Trotsky fixe quant à lui le prologue de la Révolution russe en 1905. Et la fin de la révolution, peut-on la fixer en 1921/1922 à la fin de la guerre civile, en 1923 à la fin de la poussée révolutionnaire en Allemagne, en 1924 à la mort de Lénine, ou au moment où Staline prend le contrôle total du parti ? Sans prétendre trancher cette question au détour d’un article, il est clair qu’il n’est pas possible de résumer la Révolution russe à son moment de basculement, entre février et octobre 1917. L’analyse de ces mois décisifs est essentielle, mais on ne peut comprendre cette période sans analyser les processus en cours depuis au moins une dizaine d’années, et sans intégrer la suite de la Révolution, au moins pendant toute la guerre civile.Le processus révolutionnaire fut extrêmement profond. L’insurrection anonyme de février 1917 est un soulèvement spontané. La révolution est discutée avant la prise du pouvoir d’octobre dans des meetings, les journaux ; elle met en branle des millions d’ouvriers, de soldats, de paysans qui se soulèvent, refusent l’obéissance, enfreignent les ordres, affirment leurs droits pendant des années. Deux témoignages, parmi des milliers, illustrent la force de cette révolution, amplifiée par le brassage dans les armées qui ont mobilisé plus de la moitié des hommes adultes : – Un soldat : « C’est qu’avant je ne savais pas à quel point les riches vivaient bien. Ici [au front] on a commencé à nous loger dans des maisons réquisitionnées et j’ai vu à quel point c’était bien; j’ai vu par terre et sur les murs toutes sortes de choses qu’ils possèdent ; partout dans la maison, il y a des choses chères, belles et qui ne servent à rien. Maintenant je vivrai de cette façon et pas avec les cafards »7. – Un capitaine : « Entre nous et les soldats, l’abîme est insondable. Pour eux, nous sommes et resteront des barines [maîtres]. Pour eux, ce qui vient de se passer, ce n’est pas une révolution politique, mais une révolution sociale, dont ils sont les vainqueurs et nous sommes les vaincus. Ils nous disent, maintenant qu’ils ont leur comité : « Avant, vous étiez les barines, maintenant c’est à notre tour de l’être! ». Ils ont l’impression de tenir enfin leur revanche après des siècles de servitude....8 ». La révolution, c’est un mouvement de fond dans lequel toute forme d’autorité disparaît et qui met en branle toutes les couches de la société. Les soldats désertent par dizaines de milliers, massacrent les officiers, les paysans pillent et brûlent les maisons des propriétaires fonciers, les ouvriers occupent leurs usines et contrôlent la production, dans les périphéries de l’empire les peuples se battent pour leur liberté vis-à-vis de l’impérialisme grand-russe. Paysannerie et classe ouvrière dans la révolution Si le parti bolchevik a pu arriver au pouvoir, c’est parce qu’il a été la seule force politique à soutenir ces mouvements plébéiens, à s’impliquer totalement dans la contestation de toutes les formes de l’ordre impérial, et à leur donner un débouché politique. Il a offert une réponse à des courants fondamentaux de la société russe qui voulaient sortir de la guerre et combattre l’exploitation et les oppressions. Ce qui se passe dans la guerre civile le démontre clairement. Les paysans qui s’opposaient, parfois militairement, à l’armée rouge à cause des réquisitions de vivres repassaient du coté de la révolution quand réapparaissaient les armées blanches qui remettaient immédiatement en place le régime d’oppression précédent, avec toutes ses brutalités. Pour démontrer le caractère prolétarien de la Révolution, on a trop longtemps occulté la place centrale des paysans dans le processus. La prise du palais d’hiver et de tous les points stratégiques (gares, poste, télégraphe, etc.) à Petrograd est le point de basculement, mais le nouveau pouvoir a pu tenir parce que la révolution balayait l’ensemble de l’empire russe. Y compris dans cette prise du pouvoir à Petrograd, la place des paysans sous l’uniforme est incontournable. Ce sont des unités militaires, trois unités de marins, deux régiments accompagnées de quelques unités de gardes rouges qui prennent part à l’assaut final, organisé par le comité militaire révolutionnaire, pas une manifestation ouvrière. Pour ces raisons, Marc Ferro estime que la définition d’Octobre comme révolution prolétarienne n’a rien d’évident9. Si cette remarque provocatrice a le mérite de pointer la place de la paysannerie dans le processus, elle n’explique pas comment la révolution a effectivement eu lieu. Bien que minoritaire dans la société russe, le prolétariat était la seule force sociale, consciente et organisée qui pouvait apporter une réponse à l’échelle nationale à la désagrégation de l’ensemble de la société. Malgré leur radicalité, ce n’est pas l’addition de milliers de soulèvements paysans cherchant à régler les questions chez eux, sur leurs terres, dans leurs territoires, qui pouvait permettre la mise en place d’un pouvoir alternatif à celui du tsar et de l’aristocratie. Il fallait à la fois un projet s’appuyant sur l’auto-organisation des masses en révolution – les soviets, conseils, et autres formes auto-organisées – autour d’une force sociale capable de donner vie à ce projet, en l’occurrence le prolétariat hyper-centralisé dans d’énormes usines localisées dans quelques villes (en particulier Petrograd). Cette classe ouvrière industrielle récente avait toujours des liens profonds avec la campagne, d’où provenaient l’immense majorité des travailleurs et travailleuses (30% des ouvriers sont des ouvrières). Cette proximité fut renforcée par la guerre. Toutes les proclamations s’adressaient aux ouvriers, aux soldats et aux paysans. Les organisations de masse, les soviets, étaient organisés sur ces bases. L’enthousiasme pour la prise du pouvoir par les soviets était réel, car c’est à cette seule condition que pouvaient être satisfaites les revendications résumant les besoins immédiats de tous les exploité·e·s et des opprimé·e·s de la Russie : la paix immédiate, la terre aux paysans, le contrôle ouvrier, le droit des peuples à disposer d’eux-mêmes, et la démocratie avec la convocation de l’assemblée nationale constituante. Quand Lénine veut convaincre le Comité Central bolchevik de décider l’insurrection en urgence, il insiste sur la montée de la révolution en Europe, la situation militaire (le risque de voir Petrograd pris par l’armée allemande), la majorité Bolchevik au sein des soviets, et, élément qui n’est pas le moins important, l’insurrection paysanne en cours. A cet égard il est intéressant de revenir sur les critiques que Rosa Luxemburg adressa aux dirigeants bolcheviks en 1918 dans sa célèbre brochure écrite en prison, « La révolution russe »10, notamment dans le chapitre « Deux mots d’ordre petits bourgeois ». Elle y affirme que le partage des terres par les paysans non seulement n’est pas une mesure socialiste, « mais elle barre la route qui y mène, elle accumule devant la transformation socialiste de l’agriculture des difficultés insurmontables…..La réforme agraire de Lénine a créé pour le socialisme dans les campagnes une nouvelle et puissante couche d’ennemis, dont la résistance sera beaucoup plus dangereuse et plus opiniâtre que l’était celle de l’aristocratie foncière ». Elle affirme également que le droit des peuples à disposer d’eux-mêmes fournit « des mots d’ordre à la politique contre-révolutionnaire ». Elle ajoute : « Si, malgré tout, des hommes politiques aussi réfléchis que Lénine, Trotsky et leur amis, qui n’ont que haussements d’épaules ironiques pour des mots d’ordre utopiques tels que « désarmement », « société des nations », etc., ont fait cette fois leur cheval de bataille d’une phrase creuse du même genre, cela est dû, nous semble-t-il, à une sorte de politique d’opportunité. Lénine et ses amis comptaient manifestement sur le fait qu’il n’y avait pas de plus sûr moyen de gagner à la cause de la révolution les nombreuses nationalités allogènes que comptait l’empire russe que de leur accorder, au nom de la révolution et du socialisme, le droit absolu de disposer de leur propre sort. C’était une politique analogue à celle que les bolcheviks adoptaient à l’égard des paysans russes, qu’ils pensaient gagner à l’aide du mot d’ordre de prise de possession directe des terres et lier ainsi au drapeau de la révolution et du gouvernement prolétarien. Malheureusement, dans un cas comme dans l’autre, le calcul s’est révélé entièrement faux ». Rosa Luxembourg met en évidence les problèmes que vont poser les dynamiques ultérieures de la révolution. Mais sans la reprise et le début de réalisation par les bolcheviks des revendications de partage des terres et du droit des peuples à disposer d’eux-mêmes, la révolution en Russie aurait sans doute été vaincue beaucoup plus tôt. Du point de vue des masses, il y avait un besoin absolu de trouver une réponse aux aspirations à vivre mieux et sans oppressions, et ces décisions du nouveau pouvoir offraient une réponse aux besoins de millions d’hommes et de femmes engagé·e·s dans un vaste mouvement populaire d’émancipation ayant ses dynamiques propres. C’est la force des dirigeants bolcheviks d’avoir su tracer les voies d’une révolution en Russie en partant de la réalité, concrète et éminemment complexe, de la société russe, conçue par eux comme prologue d’une révolution mondiale. Le parti bolchevik comme parti de masse Toute une historiographie raconte le passage du parti bolchevik d’un petit groupe de révolutionnaires professionnels à une organisation de masse en quelques semaines. C’est en fait un peu plus compliqué. Lors de la fusion de 1906, Pierre Broué indique que le parti ouvrier social démocrate (dans lequel les bolcheviks sont minoritaires11) regroupe environ 50 000 militants. Il se renforcera pour atteindre 77 000 membres en 1907, avant de retomber sous l’effet de l’affaissement du mouvement ouvrier et de la répression à moins de 10 000 en 1910. Lorsque l’organisation bolchevik se reconstitue en 1916, elle regroupe en pleine guerre environ 5 000 militants. Ce sont des militants d’une organisation qui subit une répression féroce, avec des arrestations, des exécutions, qui est implantée quasiment uniquement dans les villes, dans un pays de 165 millions d’habitants, à 85% rural. Dans leur milieu, dans les villes industrialisées, les bolcheviks sont loin d’être un groupe minoritaire. Lors de la campagne électorale pour l’élection de la Douma en 1912, les bolcheviks mènent une campagne autour de trois mots d’ordre12 qui traduisent les principales revendications du prolétariat et de la paysannerie russes : « République démocratique », qui pose la question du renversement du tsarisme, « journée de 8 heures », et « Confiscation des terres des grands propriétaires », qui pose la question d’une réforme agraire. Le mécanisme électoral, à deux niveaux, prévoit des élections par différentes couches de la population, avec dans certaines villes des votes par curies ouvrières13. Les bolcheviks gagnent 6 des 9 curies ouvrières qui regroupent selon Badaev un million d’ouvriers14. Ce dernier affirme que « les bolcheviks représentent au moins les trois quarts des ouvriers révolutionnaires »15, que « les bolcheviks ont obtenu les votes de 5 fois plus d’ouvriers que les mencheviks ». Orlando Figes16 ajoute qu’en 1914 les bolcheviks « avaient pris le contrôle de tous les plus grands syndicats de Moscou et de Saint Saint-Pétersbourg. Créé en 1912 avec le soutien financier de Gorki, notamment, leur journal – la Pravda – avait la plus forte diffusion de toute la presse socialiste, avec près de 40 000 exemplaires achetés chaque jour par des ouvriers qui la lisaient à plusieurs » A la veille de la première guerre mondiale, le parti bolchevik était donc majoritaire dans le mouvement ouvrier russe, tant du point de vue électoral comme on vient de le voir, que du point de vue de la presse, du mouvement syndical et du nombre de membres. Ernest Mandel cite une enquête d’Emile Vandervelde, ennemi farouche des bolcheviks, allé en Russie au nom du Bureau Socialiste International au début de 1914 qui reconnaît que les bolcheviks sont majoritaires à tous les points de vue dans la classe ouvrière russe. Petrograd, centre politique et économique de la Russie, est la place forte des bolcheviks, une ville industrielle de 2,7 millions d’habitants avec 390 000 ouvriers d’usine et une garnison d’environ 300 000 hommes, auxquels il faut ajouter les 30 000 marins de Kronstadt. Juste après la révolution de février 1917, alors que le pays est toujours en guerre, les différents auteurs estiment que les bolcheviks organisent 10 000 militants. Alexander Rabinovitch17 écrit qu’ils étaient 2000 à Pétrograd. La progression est ensuite très rapide : selon Pierre Broué18, en avril 1917 ils seraient 79 000 dont 15 000 à Petrograd, en juillet 170 000 dont 40 000 à Petrograd. Alexander Rabinovitch donne le chiffre de 32 000 pour Petrograd à la fin du mois de juin, auxquels il ajoute 6000 membres de l’organisation militaire bolchevik. Quoiqu’il en soit, 2000, puis 15 000, 30 à 40 000 militants à Petrograd, dans une population ouvrière de 400 000 personnes et une garnison de 330 000 hommes, il s’agit d’un parti de masse, qui organise effectivement la grande majorité des ouvriers qui travaillent sans les grands centres industriels de la ville, comme l’immense usine d’armements Poutilov (plus de 30 000 ouvriers) et les usines de plusieurs milliers d’ouvriers des quartiers ouvriers de Narva et Vyborg (Mettalist 8000, Erikson, Novy Lessner, Renault, etc.). Au milieu d’un océan paysan, ces cités prolétariennes sont des îlots dans lesquels les bolcheviks, d’abord en tant que militants du PSDOR puis en tant que bolcheviks, organisent effectivement les ouvriers depuis de nombreuses années et sont majoritaires dans nombre de secteurs décisifs lorsqu’éclate la révolution de février 1917. Ce parti qui joue un rôle central dans toutes les luttes sociales et politiques est rejoint par des dizaines, puis des centaines de milliers de militants. Ceci explique l’accroissement des votes en faveur des Bolcheviks au cours de l’année 1917. Entre le premier congrès des soviets de juin et le deuxième d’octobre 1917, la fraction bolchevik est multipliée par trois. A l’entrée du congrès des soviets d’Octobre, 300 délégués sur 67019 sont bolcheviks, plus de la moitié des SR (193) sont des SR de gauche et une cinquantaine n’ont pas d’affiliation. Les bolcheviks sont majoritaires avec les SR de gauche, et dirigent le Presidium. Retour sur la bureaucratisation des soviets et du parti bolchevik Pour Marc Ferro, la bureaucratisation est consubstantielle à l’auto-organisation. Il constate en effet que les soviets, les comités d’usine, la garde rouge, etc. se dotent spontanément d’un lourd appareil administratif, et que la croissance numérique et la professionnalisation des membres des comités sont extrêmement rapides, y compris avant octobre 1917. Chaque organisme tente de s’imposer, certains pratiquent la terreur et, sur fond d’une tradition du fonctionnarisme héritée du tsarisme ont une « conception du processus de décision [qui est] assez éloignée des canons de la démocratie, même directe, même sauvage »20. L’historien Claudio Sergio Ingerflom pense que « les traits du pouvoir communiste généralement associés au totalitarisme et sont en fait un héritage de la Russie tsariste : une société trop fragmentée pour qu’existe une réelle lutte des classes, trop polarisée dans un rapport individu/autocrate pour que se constitue un citoyen, trop violente pour permettre la confrontation démocratique des idées….distinct de la société grâce à la stricte sélection de ses membres mais intervenant sur elle, le Parti reproduit à un échelle plus vaste les tares du mode de fonctionnement autocratique, et sa prise du pouvoir à la faveur de la révolution est bien le signe du manque de maturité de la société »21. Ces diverses analyses méritent qu’on s’y arrête dans la mesure où la réponse à ces questions est essentielle pour la définition d’un projet émancipateur : non seulement les conséquences de la dégénérescence de la révolution russe en dictature stalinienne sont toujours présentes, notamment sous la forme d’une délégitimation des idées communistes, mais aussi parce que, les mêmes causes produisant les mêmes effets, les mouvement révolutionnaires futurs auront sans doute à affronter le danger de la bureaucratisation. L’absence d’une société démocratique, avec des traditions d’échanges contradictoires, de controverses, de règlement des divergences, d’élaboration de décisions majoritaires, voire consensuelles y compris dans des franges limitées de la population, avant la révolution est indiscutable, tout comme l’extrême violence de la société tsariste. Les massacres de la guerre civile sont partagés par toutes les armées, et nombre de pratiques reprochées aux bolcheviks étaient monnaie courante sous le tsarisme. Cette violence de l’intervention de l’Etat fut encore accentuée par la Première guerre mondiale qui, en Russie comme dans toutes les sociétés, engendra une « brutalisation » des rapports humains (Mosse). En revanche, l’idée souvent avancée que le parti bolchevik est distinct de la société grâce à la stricte sélection de ses membres, et reproduit à une échelle plus vaste les tares du mode de fonctionnement autocratique est beaucoup plus contestable. Elle est souvent reprise par les courants anarchistes, pour lesquels le pouvoir bolchevik est comparable, sinon identique, aux autres formes de pouvoir hiérarchique. La sélection des militants bolcheviks avant février 1917 est réelle. S’impliquer dans ce parti avec les risques encourus nécessite une détermination et une motivation indiscutables. La répression de tout mouvement social est implacable : au total le régime tsariste aurait exécuté 15 000 personnes, abattu ou blessé au moins 20 000, et déporté ou exilé 45 000 entre mi-octobre 1905 et avril 190622. En 1917, le militant moyen bolchevik a passé près de quatre ans dans les geôles tsaristes ou en exil23. Ce n’est plus la même sélection pour les 150 000 à 200 000 militants qui le rejoignent au cours de l’année 1917. Nombre d’entre eux le rejoignent ou le quittent, y restent ou y reviennent, etc. Le parti est à l’image de la société russe des villes et des armées, à l’image du prolétariat. Par exemple Pretichenko, celui qui deviendra en mars 1921 président du Comité révolutionnaire provisoire pendant la révolte de Kronstadt, a adhéré au parti bolchevik en 1919 avant de le quitter. En mars 1919, Pierre Broué estime à 250 000 le nombre de membres du parti bolchevik. Ils deviendront 610 000 un an après, et 730 000 en mars 1921 !

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