anarchiste individualiste
7 Janvier 2016
Le ton monte un peu plus chaque jour en Iran pour condamner l'attaque contre l'ambassade d'Arabie saoudite, survenue à Téhéran le 2 janvier. Ayant déjà dénoncé la mise à sac, le président iranien, Hassan Rohani, a demandé le 6 janvier, dans une lettre adressée au chef de la justice, Sadegh Larijani, de juger "rapidement et en comparution immédiate" les auteurs et les commanditaires de l'attaque. "Il faut punir les responsables de cet évident délit pour que ce genre d'atteintes à la sécurité nationale et d'insultes à l'intégrité et à la position du pouvoir ne se reproduise plus jamais", peut-on y lire.
Quelques heures plus tard, lors de la réunion hebdomadaire avec le cabinet, Hassan Rohani a enjoint les ministères du renseignement et de l'intérieur de poursuivre sérieusement les officiers qui n'auraient pas rempli leur engagement d'assurer la sécurité de l'ambassade.
Selon Hassan Rohani, ceux qui ont pris part à l'assaut de la mission diplomatique saoudienne ont agi soit par "ignorance", soit par leur "affiliation" aux pays ennemis ou aux groupes politiques en Iran qui veulent saboter la détente nouvellement retrouvée entre Téhéran et la communauté internationale. Cette accalmie est avant tout le fruit de l'accord obtenu avec l'Occident, le 14 juillet 2015 à Vienne, sur le dossier du nucléaire iranien.
"Attaquer les bâtiments gouvernementaux est contraire à la charia et à la loi et constitue une atteinte à la réputation de la République islamique d'Iran", a conclu Hassan Rohani, tout en critiquant Riyad pour avoir rompu ses liens diplomatiques avec Téhéran, quelques heures après l'attaque.
>> A lire : "En Iran, condamnation unanime après l’attaque de l’ambassade saoudienne"
Si les manifestants, appartenant vraisemblablement aux milices populaires iraniennes, le bassidj, attendaient l’approbation du Guide suprême, Ali Khamenei n’a même pas mentionné les événements survenus à l’ambassade saoudienne, ni la décision de Riyad de rompre ses relations diplomatiques avec Téhéran.
Lundi 4 janvier, lors d’un discours devant les prêcheurs de la prière du vendredi, la plus haute autorité iranienne a seulement évoqué l’importance des élections législatives, prévues le 26 février, et celles de l’Assemblée des experts, en charge de nommer le guide en cas du décès d’Ali Khamenei. Depuis la prise de parole d’Ali Khamenei, d’autres pays ont rompu leurs liens diplomatiques avec Téhéran, notamment Bahreïn et le Soudan, alors que les Emirats arabes unis ont rappelé leur ambassadeur.
Membre ultraconservateur de l’Assemblée des experts, Ahmad Khatami, a également atténué sa position et fait marche arrière en déclarant, le 4 janvier, que « brûler les ambassades n’apportait rien ». Un peu plus tôt, une de ses petites phrases – « la famille saoudienne sera effacée des pages de l’Histoire », prononcée le 2 janvier- avait fait la « une » desmédias.
De son côté, le président iranien, Hassan Rohani, a dénoncé les événements survenus à la représentation diplomatique saoudienne et promis que les autorités allaient réagir à ces « infractions ». Ceci a même valu au chef de l’Etat le soutien d’un de ses farouches adversaires, Sadegh Larijani, chef du pouvoir judiciaire. Ce dernier a surpris en condamnant fermement l’attaque à l’ambassade, en la qualifiant d’« incorrecte » et d’« illogique ».
Lire aussi : Al-Nimr, l’exécution qui cristallise la colère entre l’Iran et l’Arabie saoudite
Ce changement d’attitude et la condamnation unanime des actions menées par les éléments les plus radicaux du pays peuvent s’expliquer par la volonté du pouvoir iranien de ne pas dilapider les dividendes engrangés sur la scène diplomatique internationale à la faveur de l’accord sur le nucléaire iranien, obtenu en 2015 à Vienne, avec les cinq membres permanents du Conseil de sécurité des Nations unies, plus l’Allemagne.
Ce compromis négocié de haute lutte va ainsi permettre la levée progressive des sanctions internationales, mises en place dans le but de dissuader Téhéran de se doter de l’arme nucléaire. Avec l’espoir de donner un coup de pouce au pays sur le plan économique.
Cependant, l’attaque du 2 janvier risque de dissuader les investisseurs étrangers qui voulaient lancer des affaires avec Téhéran une fois les sanctions levées. Elle pourrait aussi remettre en cause la participation de Téhéran dans les pourparlers destinés à tro
Cette séquence à haut risque s’est ouverte samedi, avec l’exécution en Arabie saoudite d’un dignitaire chiite, Nimr Al-Nimr, figure de proue des manifestations réprimées par le royaume en 2011 et 2012 dans la province orientale, à majorité chiite. Depuis sa condamnation à mort en octobre 2014, le sort d’Al-Nimr constituait une bombe à retardement. Ce religieux, formé en Iran, a été exécuté en même temps que 46 autres personnes, dont au moins trois autres chiites et une quarantaine de militants radicaux sunnites, impliqués dans des attaques menées par Al-Qaida en Arabie saoudite il y a dix ans. Il s’agit de la plus large exécution de masse dans le pays depuis 1980, selon Human Rights Watch.
Lire aussi : Al-Nimr, l’exécution qui cristallise la colère entre l’Iran et l’Arabie saoudite
Cette démonstration de fermeté intervient dans un contexte délicat. La monarchie saoudienne s’est engagée à luttercontre l’organisation Etat islamique (EI) et l’extrémisme sunnite en créant en décembre une coalition islamique « contre le terrorisme », au risque de mécontenter les milieux les plus conservateurs du pays. L’exécution du cheikh Al-Nimr était donc une forme de « gage » donné à ces derniers. Par ailleurs, Riyad vient de présenter un budget d’austérité, en réponse à la baisse des prix du brut.
La monarchie ne pouvait ignorer que l’exécution d’Al-Nimr provoquerait de violentes réactions dans tout le monde chiite. Le Guide suprême de la République islamique d’Iran, Ali Khamenei, qui revendique un leadership sur les chiites dumonde entier, a dénoncé l’exécution d’Al-Nimr. Samedi, son compte Twitter affichait un photomontage assimilant l’exécution du cheikh par un bourreau saoudien à celles menées par l’EI. Dimanche matin, il annonçait que « la main divine de la revanche saisira[it] les politiciens saoudiens par la gorge ». Le Guide se gardait cependant de prononcer des menaces directes et précises envers Riyad.
Lire aussi : Indignation mondiale après l’exécution du cheikh Al-Nimr en Arabie saoudite
Les critiques acerbes d’Ali Khamenei font écho à celles formulées après la bousculade de La Mecque, qui avait fait plus de 2 200 morts en septembre 2015, dont plus de 400 Iraniens. Des attaques nationalistes et anti-arabes avaient eu lieu en Iran. « Le Guide se doit de prendre en compte ce ressentiment, cette haine qui s’exprime dans l’establishment comme dans la société iranienne », analyse la sociologue Azadeh Kian, de l’université Paris-VII.
L’attaque de l’ambassade saoudienne à Téhéran, samedi, a pu obéir en partie à cette logique. Elle semble avoir été organisée par des éléments radicaux affiliés aux milices populaires iraniennes, les bassidjis. Ceux-ci s’étaient donné rendez-vous samedi devant l’ambassade saoudienne à travers un site Internet, « Les Officiers de la guerre discrète ». Une première manifestation, contenue par la police, a laissé place à une seconde vague, plus violente, qui a pénétré durant la nuit dans la représentation diplomatique et y a mis le feu.
Selon Riyad, le chargé d’affaires a tenté à plusieurs reprises de joindre le ministère iranien des affaires étrangères, mais en vain. Les diplomates ne se trouvaient alors plus dans le bâtiment. A leur place, des militants radicaux iraniens, munis de pierres et de cocktails Molotov, prenaient la pose dans les bureaux et postaient leurs photographies sur Twitter, avant d’être dispersés par les forces de l’ordre. Ce n’est que dimanche après-midi que le chargé d’affaires saoudien a puinspecter les locaux, dévastés et pillés selon Riyad.
La brusque escalade amorcée par Riyad, elle, est conforme au style énergique – impulsif, disent ses critiques – du nouveau roi Salman et surtout des deux super-ministres qui l’épaulent, son fils et vice-prince héritier Mohamed Ben Salman, chargé de la défense, et son neveu et dauphin, Mohamed Ben Nayef, affecté à l’intérieur. Dès son arrivée au pouvoir, il y a un an, ce triumvirat a musclé la diplomatiesaoudienne dans le but d’endiguer l’influence iranienne au Proche-Orient. Ce raidissement, qui contraste avec la fin de règne d’Abdallah, accusé de mollesse, s’est matérialisé par l’entrée en guerre de l’Arabie saoudite au Yémen, en mars dernier.
Aux yeux des nouveaux hommes forts de Riyad, ne pas intervenir contre les houthistes, une rébellion de confession zaïdite (un rameau du chiisme), alliés à l’Iran, aurait conduit à l’installation, à leur frontière sud, d’un Hezbollah yéménite. « Les Saoudiens estiment que les Iraniens sont en plein hubris et qu’ils cherchent à profiter du désengagement américain de la région », expliquait en décembre, un diplomate en poste à Riyad. « C’est inacceptable pour eux, ils sont décidés à ne plus les laisser passer. »
Cet accès de tension survient, paradoxalement, alors que les relations saoudo-iraniennes semblaient en voie de réchauffement. A Vienne, en novembre, lors
de la conférence sur la Syrie, les ministres des affaires étrangères des deux pays avaient accepté de s’asseoir à la même table et s’étaient même entretenus en privé. A la fin de l’année, Riyad avait annoncé son intention de nommer un ambassadeur à Téhéran, qui devait remplacer sous peu le chargé d’affaires.
Lire aussi : Le Proche-Orient, otage du conflit irano-saoudien
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Vos réactions (6)Réagir
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Thierry Garnier il y a 2 jours
Le seul bon coté de la situation est qu'elle est train de s'éclaircir. Il va falloir choisir notre camp.
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Citoyen étonné il y a 2 jours
La plupart des analystes sont d'accord pour dire que les Saoud sont en mode panique. Mais rares sont ceux qui relèvent le role ambigu de Turquie qui fait à la fois des courbettes à Israel et aux Saoud, lesquels sont alliés contre l'Iran. On peut en conclure que les Saoud, en mode panique et peut-etre en cours de lachage par les USA (lire les éditos néo-cons), tentent aussi la carte de l'alliance Turquie-Israel-KSA contre l'Iran, Turquie et Israel étant les seuls à pouvoir forcer la main des US
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Citoyen Français il y a 2 jours
Cette explosion conflictuelle entre KSA et l'Iran est un résultant de l'accord entre l'occident et l'Iran. Cet accord va conduire finalement va une surrenchere !
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NM il y a 3 jours
Cette histoire va sûrement mal se terminer, depuis des décennies une guerre "froide" (sur fond religieux sunnite vs chiites) existe entre les 2 principales puissances de la région L'Arabie Saoudite et l'Iran...maintenant la guerre semble moins froide, les hostilités vont se multiplier, entre ce qui se passe déjà avec l'EI et le chaos existant dans la plupart des pays une guerre ouverte entre saoudiens et iraniens va accélérer l'explosion de toute la région...
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Andre Angle il y a 3 jours
Les histoires de religion n'en finissent jamais. Elles sont la source de millions de morts et le PO ignor la tolerance.
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Jean-Marc Lemercier il y a 2 jours
La question religieuse n'est qu'une partie du contentieux entre KSA et Iran, la plus visible, mais certainement la moins déterminante. Souvent derrière les guerres de religion se cachent le conflit entre l'absolutisme et des formes concurrentes d'organisation sociale et des intérêts économiques. Ici de ce que j'ai compris, c'est la contagion de l'organisation politique en pseudo démocratie que combat la féodalité à la sauce Saoud. Pour arranger le tout, côté pétrole, ça ne va pas trop fort.
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