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SERPENT -  LIBERTAIRE

anarchiste individualiste

Aqmi est revenu sur le devant de la scène au Sahel en sous-traitant ses attaques

Le groupe terroriste a revendiqué l'attaque terroriste qui a provoqué la mort d'au moins 29 personnes à Ouagadougou, dans la nuit du 15 au 16 janvier.

À quelques heures d'intervalles, deux attaques terroristes ont éclaté aux extrémités du continent africain vendredi 15 janvier. En début d'après-midi, des combattants Shabaab ont pris d'assaut une base militaire de l'Amisom, la force armée régionale déployée en Somalie pour sécuriser le pays, tuant plus de 60 soldats kényans sur le sol somalien. Puis, dans la nuit du 15 au 16 janvier, des djihadistes ont ouvert sur le feu en plein-centre de Ouagadougou, la capitale du Burkina Faso, tuant au moins 29 personnes dont 14 étrangers.

Très différentes dans leur mode opératoire et leur cible, les deux attaques ont cependant un point commun: elles ont été perpétrées par des organisations qui ont prêté allégeance à Al-Qaïda au Maghreb islamique (Aqmi), la branche du groupe terroriste qui opère sur le continent africain.

«Les attaques sur les extrémités opposées du continent contre des cibles très différentes pointent la constance d'al-Qaïda, des années après que des officiels américains aient déclaré que l'influence de l'organisation avait sévèrement chuté», analyse le magazine américain Foreign Policy.

Un rapport du Département d'État américain datant d'avril 2014 expliquait également qu'al-Qaïda avait profité de la faiblesse de plusieurs États en Afrique du Nord pour s'allier avec des groupes à l'idéologie proche afin d'«élargir et renforcer ses opérations» dans la région.

Des alliances pour survivre

L'attaque menée contre des lieux fréquentés par la population aisée de Ouagadougou, dont de nombreux expatriés, a eu un énorme retentissement mondial de par sa cible. Surtout, elle intervient deux mois à peineaprès l'assaut du Radisson Blu hotel à Bamako, qui avait fait 22 victimes le 20 novembre 2015. Comme au Burkina Faso, Al-Mourabitoune, un groupuscule dirigé par Mokhtar Belmokhtar qui avait fait lui-même dissidence avec Aqmi il y a quelques années, avait revendiqué, conjointement avec Aqmi, l'attaque menée à Bamako.

Les deux groupes djihadistes, auparavant rivaux, avaient annoncé leur alliance quelques jours après la prise assaut du Blu Radisson hotel. «Alors que l’État islamique perce en Libye et qu’au Nigeria Boko Haram a prêté allégeance au califat d’Al-Baghdadi, la “centrale historique fondée par Ben Laden, bousculée par l’EI, a pu exiger cette nouvelle alliance pour garder la haute main sur le jihad en Afrique de l’Ouest», note Libération. Nous expliquions également sur Slate.fr, que pour contrer les actions spectaculaires de l'État islamique en Libye, Aqmi appelle aujourd'hui les musulmans à bouter les Espagnols hors des enclaves de Ceuta et Melilla, et à s'en prendre aux étrangers en Libye.

Pour Samuel Nguembock, chercheur à l'Institut des relations internationales et stratégiques (Iris), les alliances nouées par Aqmi en Afrique sont des actes très rationnels.

«C'est une adaptation au rapport de force sur le terrain. L'accélération des attentats est une stratégie de survie. Daech a gagné beaucoup de terrain en peu de temps, et ça été l'inverse pour Aqmi. Face à cette réalité, le groupe a dû se réorganiser et nouer des alliances», explique à Slate.fr ce spécialiste du terrorisme au Sahel.

Dans la coopération entre Aqmi et al-Mourabitoune, la seconde semble être le bras armé de la première en menant les attaques sur le terrain, comme c'était le cas à Bamako puis à Ouagadougou: quand Aqmi semble plutôt axer ses efforts sur le plan organisationnel et sur la «communication» autour de son «djihad global». Dans son communiqué revendiquant l'attaque de Ouagadougou, Aqmi a notamment affirmé avoir visé un«repaire des services occidentaux en Afrique de l'Ouest», comme le rapporte sur son compte Twitter, Romain Caillet, chercheur spécialiste du djihadisme.

Une synergie entre djihadistes

Les mouvances djihadistes du Sahel, dont Aqmi, ont été durement frappées par les frappes des armées françaises et maliennes lors de l'opération Serval en 2013. Cette guerre frontale a affaibli des groupes concurrents qui pour résister ont tissé de nombreux liens entre eux. Aqmi s'était allié avec l'organisation Ansar Dine dans le nord du Mali en 2012.

«Il y a une rivalité, mais aussi une synergie entre les djihadistes», nous confiait Naffet Keita, chercheur à l'université de Bamako, au lendemain de l'attaque du Blu Radisson hotel.

Dans sa guerre contre les gouvernements de la région et l'armée française, Aqmi cherche aussi à viser le cœur des États, pour mieux agir à sa guise sur leurs frontières, comme l'explique Samuel Nguembock de l'Iris.

«Aqmi est un groupe qui dès qu'il perd du terrain se replie sur ses bases arrières. Ils profitent de la porosité des frontières au Sahel pour garantir la sécurité du noyau de l'organisation. Quand la pression militaire des forces gouvernementales augmente, ils attaquent au centre du pays où la sécurité est moins assurée, pour obliger l'armée a relâché sa pression sur les zones périphériques.»

Mais pour exister et mener des actions de grandes envergures, Aqmi a aujourd'hui d'abord besoin de l'aide de groupes djihadistes locaux.

Camille Belsoeur

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