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SERPENT -  LIBERTAIRE

anarchiste individualiste

Qu’est-ce que le mouvement BDS, à l’origine des appels au boycott d’Israël ? En savoir plus sur http://www.lemonde.fr/les-decodeurs/article/2015/11/13/qu-est-ce-que-le-mouvement-boycott-desinvestissement-sanctions-qui-agace-israel_

Le gouvernement israélien craint que la décision européenne ne vienne renforcer ce mouvement international qui milite pour la cause palestinienne

La décision de l’Union européenne, mercredi 11 novembre, d’étiqueter les produits israéliens issus des territoires palestiniens occupés a provoqué la colère d’Israël. Le gouvernement de droite de Benyamin Nétanyahou craint que la mesure européenne ne « soutienne et encourage » le mouvement international Boycott, désinvestissement, sanctions (BDS) contre l’Etat hébreu.

Qui est à l’origine de ce mouvement ?

En 2005, des militants propalestiniens lancent à travers le monde un appel au « boycott, au désinvestissement et aux sanctions contre Israël ». Le mouvement, inspiré du boycott de l’Afrique du Sud dans les années 1980 et appelé « BDS », s’oppose à l’occupation israélienne par des appels répétés au boycott de compagnies israéliennes et étrangères opérant dans les colonies israéliennes ou dans les territoires occupés.

En France, où le mouvement s’est lancé en 2009 après la guerre de Gaza, on compte une cinquantaine d’associations et d’organisations signataires, parmi lesquelles l’Association France Palestine solidarité (AFPS), le Parti de gauche, le Nouveau Parti anticapitaliste (NPA) ou encore ATTAC.

Quelles sont ses revendications ?

Dans une interview donnée au Monde en juillet, le cofondateur du mouvement, Omar Barghouti, évoquait « trois exigences fondées sur le droit international » :

- « La fin de l’occupation israélienne de 1967, ce qui inclut le démantèlement des colonies de Cisjordanie et la destruction du mur » ;

- « La fin du système israélien de discrimination juridique à l’égard des citoyens palestiniens d’Israël, système qui correspond aux critères de l’apartheid tels que définis par l’ONU » ;

- « L’autorisation pour les réfugiés palestiniens, chassés de force en 1948 et en 1967, de regagner leur domicile ou leur région d’origine, dans le cadre des résolutions de l’ONU sur ce point. »

Lire aussi : Omar Barghouti : « Face à Israël, la France est hypocrite »

Boycott, désinvestissement, sanctions

Le mouvement mène dans de nombreux pays (Royaume-Uni, Etats-Unis, Belgique, Allemagne, etc.) des actions d’appels aux boycotts commerciaux, universitaires ou culturels pour faire pression sur Israël. Il assure ne pas viser « des personnes ou des groupes en raison de leur origine ou de leur religion juive, ni leurs entreprises ou leurs produits » mais bien « la politique coloniale d’occupation israélienne et ses partisans ».

Comme l’indique son nom, le mouvement BDS veut agir sur trois volets.

  • Le boycott : le mouvement veut pousser les consommateurs à ne pas acheter de produits manufacturés en Israël ou dans les colonies.
  • Le désinvestissement : l’organisation mène des actions de lobbying auprès des gouvernements, des institutions et des entreprises pour qu’elles cessent d’investir ou de coopérer économiquement avec l’Etat hébreux. BDS a notamment joué un rôle dans la décision de Veolia de vendre presque toutes ses activités en Israël ou plus récemment dans la décision d’Orange de rompre son partenariat avec l’entreprise israélienne de télécommunications Partner, présente dans les colonies israéliennes.
  • Les sanctions : c’est-à-dire essentiellement la remise en cause des accords économiques de l’Union européenne avec Israël, BDS demandant à l’UE de sanctionner Israël au vu de ses violations du droit international.

De longues batailles juridiques

En France, le mouvement fait l’objet depuis 2010 de poursuites systématiques. En février 2010, Michèle Alliot-Marie, alors ministre de la justice, fait parvenir une circulaire aux procureurs visant les « appels au boycott de produits israéliens » et recommandait aux parquets d’apporter « une réponse ferme ».

Le 20 octobre, la Cour de cassation a confirmé la condamnation par la cour d’appel de Colmar de 14 militants de BDS à 28 000 euros de dommages et intérêts aux parties civiles, ainsi qu’à une amende de 1 000 euros avec sursis pour chacun des militants. Il leur est reproché d’avoir participé à une manifestation dans un magasin Carrefour à Illzach (Haut-Rhin), « appelant au boycott des produits en provenance d’Israël ». Pour la haute juridiction française, le délit de « provocation à la discrimination, à la haine ou à la violence envers une personne ou un groupe de personnes à raison de leur origine ou de leur appartenance à une ethnie, une nation, une race, ou une religion déterminée » est bien constitué.

Ces arrêts de la Cour de cassation font de la France l’un des rares pays du monde, et la seule démocratie, où l’appel au boycott par un mouvement associatif ou citoyen pour critiquer la politique d’un Etat tiers est interdit. Plusieurs militants pro palestiniens soulèvent d’ailleurs le fait que tous les appels au boycott ne soient pas traités de la même manière : les appels au boycott contre l’Afrique du Sud du temps de l’apartheid, contre la Birmanie du temps de la junte ou même contre le Mexique au moment de l’affaire Florence Cassez n’ont jamais fait l’objet de poursuites.

Le BDS réfléchit actuellement à porter l’affaire devant la Cour européenne des droits de l’homme où il souhaiterait invoquer l’article 10 de la convention européenne des droits de l’homme sur la liberté d’expression.

Inquiétudes du gouvernement israélien

L’impact du BDS sur le plan économique est encore difficilement mesurable. Mais chaque nouvelle campagne ciblant un grand groupe étranger, un supermarché, un annonceur ou un opérateur pour lesinciter à ne plus investir en Israël fait connaître un peu plus le mouvement.

L’importance réelle du BDS est toujours débattue. « Ça ressemble à un tsunami politique, mais, en réalité, ses militants sont actifs dans pas plus de dix ou douze endroits dans le monde, la plupart enEurope », soulignait au Monde l’expert Eran Shayshon, qui a beaucoup travaillé sur le BDS au sein du Reut Institute, à Tel-Aviv.

Lire aussi : Israël face à la menace montante du boycottage

Tout cela n’empêche pas le gouvernement israélien de s’inquiéter de la montée du mouvement. M. Nétanyahou a récemment dénoncé une « campagne internationale pour noircir la réputation d’Israël ». Pour lui, ceux qui soutiennent le BDS mettent en cause jusqu’à l’existence de l’Etat hébreu.

Comment le mouvement a-t-il accueilli la décision européenne ?

Les produits concernés par la nouvelle décision européenne d’étiqueter les produits fabriqués dans les colonies représentent « moins de 1 % » du total des échanges commerciaux entre l’UE et Israël, soit 154 millions d’euros en 2014, selon des chiffres de la Commission. L’ambassadeur israélien avait pour sa part évalué les produits visés à « 2 % à 3 % » des exportations israéliennes vers l’UE, soit une valeur à 200 millions de dollars (187 millions d’euros) chaque année.

Le Comité national palestinien pour le BDS s’est tout de même réjoui de la décision « qui montre que les gouvernements européens réagissent à l’opinion publique, aux campagnes de la société civile comme à l’intransigeance israélienne ».

Mahmoud Nawajaa, le coordinateur général du BDS palestinien, a cependant nuancé ses propos :« Mettre en place quelques étiquettes sur un petit nombre de produits israéliens n’est pas une réponse à la mesure des crimes de guerre israéliens continus. » Même constat pour Imen Habib, animatrice du BDS en France, pour qui cette décision est insuffisante : « Ce que nous demandons c’est l’interdiction pure et simple de ces produits par l’UE. Etiqueter ces produits, c’est légitimer des produits fabriqués dans des territoires occupés considérés comme illégaux aux yeux du droit international. »

  • Romain Geoffroy
    Journaliste au Monde

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