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SERPENT -  LIBERTAIRE

anarchiste individualiste

Faire face à l’incurie du pouvoir politique : à propos d’une tentative de récupération du mouvement de la Tentes des glaneurs

~Depuis la fin 2010, les sans-abri, les familles monoparentales, les chômeurs, les retraités, mais aussi les étudiants et les travailleurs pauvres s’organisent indépendamment des associations dépendantes des pouvoirs politiques. C’est ainsi qu’est né de mouvement la Tente des glaneurs, à Lille et à Caen. Ces personnes que les politiques antisociales menées par les différents gouvernements ont précarisées, jusqu’à ne plus pouvoir se nourrir, se sont organisées pour collecter elles-mêmes sur les marchés des fruits et des légumes, mais aussi du pain et autres denrées alimentaires, invendues et laissées à l’abandon par les maraîchers et les commerçants. Une fois la collecte terminée, les victuailles ainsi récoltées sont rassemblées sous une tente et réparties, distribuées par les intéressés eux-mêmes, sans intermédiaires et sans hiérarchie. Là, il n’est pas exigé de conditions de ressources, ni de justificatifs, seule est prise en compte la composition du foyer, pour savoir quelle quantité donner.

~Ce type de fonctionnement et d’organisation montre que les citoyens sont capables de mettre en place des structures où l’entraide, la solidarité et la coopération ne sont pas de vains mots. C’est également la démonstration que le peuple est responsable et est capable de s’organiser sans tuteur et sans l’autorisation d’un chef et le contrôle de l’État. À partir de ces expériences, il est aisé de comprendre que la société égalitaire et autogestionnaire chère aux anarchistes et fondée sur le principe de la coopération n’est surtout pas une utopie, comme s’évertuent à vouloir le faire croire nos détracteurs. Pour toutes ces raisons, l’État voit d’un mauvais œil se développer ce type de mouvement. Voilà pourquoi, avec l’aide de ses sectateurs, il tente de récupérer tous ces mouvements d’émancipation et de libération des citoyens qui se créent pour faire face à l’incurie des pouvoirs politiques. Il s’agit pour l’État d’encadrer les structures indépendantes pour mieux les contrôler, les maîtriser et surtout anticiper et ainsi contenir les départs de révoltes. Pour contrer ces « électrons libres » que sont les mouvements et les collectifs indépendants, l’État et les collectivités territoriales financent des associations d’insertion. Certaines mutuelles, comme la mutuelle Harmonie, vont même jusqu’à se faire les complices des gouvernements en désignant les citoyens responsables de ce gâchis

~Il ne faut pas se tromper de cible. Ce ne sont pas les citoyens qui sont la cause du gaspillage et des invendus, ce ne sont pas eux qui sont responsables de tout ce gâchis. Et, pourtant, ce sont eux que désigne l’Union Harmonie Mutuelles dans son magazine du mois de juin 2014. Elle se fait la complice des gouvernements et des sociétés alimentaires, des grandes surfaces, des grossistes en désignant, comme seul responsable du gaspillage et de la surconsommation, les consommateurs. Elle n’a pas un mot pour dénoncer les prédateurs que sont les responsables des grandes surfaces de l’alimentation, des MIN (marchés d’intérêts national), ou encore les criées (marchés aux poissons), où chaque jours des tonnes d’invendus finissent à la poubelle. Pourtant, comme on dit, il y a quelques fois de beaux restes qui pourraient faire le bonheur de millions de personnes. Cependant, dans cette société où la consommation est reine et le fric roi, rien n’est gratuit, si tu n’as pas les moyens de payer cher ta nourriture, eh bien tu crèves. Seuls les nantis s’engraissent à s’en faire péter la sous-ventrière. C’est ainsi que toutes ces sociétés préfèrent jeter à la décharge les invendus plutôt que de baisser les prix, afin que les 15 millions de pauvres recensés dans le pays puissent se procurer de la nourriture à bas prix. Elle n’a pas un mot sur les marges que réalisent ces mêmes sociétés sur les prix de vente et les prix d’achat consentis aux récoltants. Comme il est impossible de récupérer de la nourriture même lorsque ces denrées ne sont pas vendables parce qu’elles sont à un ou deux jours de la date de péremption. Les grands humanistes, maîtres de la grande distribution, des greniers alimentaires, des marchés dits d’intérêts publics et nationaux préfèrent déverser les invendus dans les bennes à ordures, plutôt que de distribuer les invendus aux citoyens. C’est qui les gaspilleurs ?

~Pour pallier à la rapacité des chevaliers d’industrie, à la férocité du système capitaliste, à la félonie des hommes et des femmes politiques, au vampirisme des affairistes, des banquiers et des patrons, des associations dites caritatives et d’insertion tentent de donner et de créer l’illusion que les richesses peuvent être partagées. C’est juste que les pauvres, les laissés pour compte, devront se contenter des restes laissés par les nantis.

~Là encore, les actions des associations, aussi louables soient-elles, contribuent à maintenir les personnes les plus démunies dans un état de soumission et de dépendance. Car, toutes ces associations sont en lien direct avec l’État (financièrement) et les administrations, car elles doivent faire profil bas pour obtenir l’agrément des départements et avoir l’autorisation de fonctionner par les préfets. Comme par exemple l’ANDES (Association nationale des épiceries solidaires), qui agit dans le cadre de chantiers d’insertion.

~Il n’y a pas de petits profits.

~Le premier chantier de ce type a vu le jour à Rungis en 1998. Depuis cette date d’autres ont été créés : à Perpignan, à Lille, à Marseille et à Lyon. Dans ces chantiers dits d’insertion, ce sont des chômeurs de longue durée qui récupèrent chaque jour, chez les grossistes des palettes de fruits et de légumes, destinés à la poubelle. Ensuite, ils effectuent un travail de tri qui permet sur 100 kilos de fruits et légumes d’en sauver environ 55 kilos de la décharge. Puis, ces 55 kilos de fruits et légumes seront vendus 30 centimes le kilo dans les épiceries solidaires du réseau, mais aussi aux Restos du cœur et dans les banques alimentaires. C’est exactement le même principe de fonctionnement qui prévaut pour les paniers de la mer qui sont régis et encadrés par la Fédération nationale des paniers de la mer. Là encore, des salariés en insertion récupèrent les tonnes de poissons invendus parce que trop chers. Ces salariés apprennent à nettoyer et à découper, puis à congeler le poisson qui sera ensuite livré à un prix défiant toute concurrence, aux structures d’aide alimentaire. Après que la première association des paniers de la mer a vu le jour dans le Finistère en 1997, quatre autres ont suivi : à La Rochelle, à Boulogne-sur-Mer, à Lorient et à Saint-Malo. Une autre va prochainement être créée à Fécamp. Il ne faut pas croire que ces grossistes et ces chevaliers d’industrie des MIN, des criées cèdent leurs invendus gratuitement. Ce ne sont pas des philanthropes, la misère leur est totalement étrangère et ils ne se sentent surtout pas responsables. Rien n’est gratuit chez ces gens-là. En contrepartie de leurs invendus, ces bienfaiteurs d’un genre particulier réduisent leurs déchets et, par la même occasion, ils réduisent le montant de la taxe qu’ils ont à payer. Ils profitent également de la défiscalisation liée aux dons aux associations.

~Plus la misère, la pauvreté et le chômage progressent et perdurent, plus ces chantiers « dits d’insertion » se développent. Ils sont l’expression même de la misère et d’un pays en voie de sous-développement.

~Les conditions de travail, d’hygiène et de sécurité ne sont guère respectées, dans ces chantiers de « l’humiliation », proches de l’esclavage. Au sein de ces structures, il n’existe aucune convention collective, le travailleur est lié au règlement de l’association. Et surtout qu’il ne s’avise pas à faire preuve d’indépendance, d’émancipation ou même de réfléchir, car il sera immédiatement suspecté d’être une forte tête, donc à surveiller. Le salarié en « insertion » doit réapprendre à être poli et à respecter le chef. Il doit également arriver à l’heure et travailler pour un salaire (des clopinettes) qui jamais ne lui permettra de s’en sortir. Mais qui, par contre, le maintiendra dans un état de dépendance totale vis-à-vis du pouvoir politique, de l’administration tatillonne et aux ordres du patronat exploiteur.

~Si « l’insertionniste » va au bout de ses deux années de contrat, l’emploi promis à la sortie s’appellera, pour 90 % d’entre eux, l’Arlésienne et ce sera, au bout du bout, le retour à Pôle emploi. Pour les 10 % qui auront réussi à dégoter « un job », il sera tout ce qu’il y a de plus précaire, salaire plus bas que bas et, au moindre soubresaut de l’entreprise, ils seront les premiers à être virés. Malheureusement, ce constat est la triste réalité et est le reflet d’une France qui est sur le déclin et en voie de décomposition. La fracture entre « une minorité de nantis et la majorité de dénantis » s’élargit et se creuse inexorablement sous les coups de boutoir du capitalisme. Il faut impérativement que les travailleurs, les laissés pour compte et tous leurs alliés s’unissent et forment un collectif au sein duquel la lutte de classe sera menée sans jamais perdre de vue que les ennemis des travailleurs et du peuple sont les patrons et l’État. La lutte des classes devra donc être exigeante et impitoyable, sans concession, sans contrepartie, sans blabla, sans accord, sans réformes destinées à faire perdurer le système. Il faudra la mener jusqu’au point de rupture du système et faire en sorte que la victoire ne soit pas dévoyée et que les aspirations à la construction d’une nouvelle société égalitaire et autogestionnaire ne soient pas récupérées et détournée de sa base par je ne sais quel charlatan ou vendeur d’orviétan.

Justhom

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